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 Mama is back } Antropy & Carlisle

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Sloan Fyresciell
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________________________________________ 2018-09-20, 21:26

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’Cause inside I’m ugly, ulgy like her.

Carlisle ne respirait plus. C’était son impression du moins, depuis qu’il avait démarrer dans l’allée de gravier gris. C’était comme une lente agonie, agonie dont il connaissait le goût, la saveur, la complexité, la construction, le parfum, même le nom. Mère. Ce serait toujours et à jamais elle, son poison. Sa seule et unique faiblesse. Sa violente cassure. Sa plus grande fêlure. Sentir Antropy contre sa peau lui donna enfin l’impression de respirer, comme libéré de cette trop longue apnée. Lentement, très lentement, il reposa son verre sur la table basse, se retournant pour lui faire face. L’espace d’un instant, il le vit faire une moue, comme incertain de si il allait le repousser ou non, mais Carlisle eue un soupir. Las. Profondément las. Son visage cessa de n’être qu’un masque, se fissurant légèrement, laissant apparaître un peu de cette guerre qui le dévorait de l’intérieur depuis si longtemps.

Il y eue un temps, puis un autre, et finalement, il passa ses bras autour des épaules d’Antropy, venant simplement poser son menton sur le haut de son crâne. Carlisle ne réclamait jamais de câlins, jamais d’attention, encore moins de ce genre. Pourtant, en cet instant, il avait enfin l’impression de comprendre l’importance que ce genre de geste pouvait avoir pour Tasha… Pendant un temps qui lui sembla plutôt long, il ne parvint pas à le relâcher, se sentant terriblement gêné et mal à l’aise d’être ainsi… Faible. Ce fut le seul mot qui lui vint à l’esprit sur l’instant, même si d’autres finirent par venir, mais…. C’était ainsi qu’il se voyait en cet instant. Faible. Incroyablement faible.

Il ne fit pas le moindre commentaire ni même le moindre son quand il se sépara enfin de lui. Ses bras reprirent leur place le long de son corps, son visage reprit un aspect lisse et sans aspérité qui le caractérisait tant. Il n’en fut cependant pas de même d’Antropy, qui sembla osciller entre le sourire niais et la tristesse profonde. Le roux garda même ses bras autour de lui, finissant par poser son menton sur son torse, l’observant en silence avec un peu de cette adoration sans borne que Carlisle apercevait parfois et qu’il ne saisissait jamais entièrement. Il eue une sorte de sourire, tordu, avant de caresser ses joues avec douceur.

-Joue moi quelque chose.

Sa voix était basse, presque un murmure. Quelque chose à mi-chemin entre la demande et la supplique. Entre l’ordre et l’ultime demande. Le roux eue l’air surpris, hésitant un instant avant d’enfin le relâcher, mais prenant sa main pour le guider, comme si il eue craint que Carlisle ne se perde dans les trois mètres qui séparait la table basse des canapés. Ou peut-être était-ce pour l’empêcher de reprendre son verre… Peu importait. Carlisle se laissa faire, docile pour une fois, venant s’asseoir dans l’un des canapés gris, laissant Antropy prendre sa guitare et tester les cordes avant de finalement jouer. L’air qu’il se mit à jouer était doux, simple, tendre. Léger. Quelque chose d’absolu et de fragile pourtant, et Carlisle se surprit à fermer les yeux un instant, lui qui pourtant adorait l’observer faire, ces mimiques qu’il faisait, cette concentration adorable que Carlisle vénérait. …

Il le laissa jouer, longtemps, vagabondant au fil des sonorités qu’Antropy lui proposa, sans jamais l’interrompre ni même esquisser le moindre mouvement. Restant simplement là, à l’écouter jouer, à l’observer jouer, à chérir cet instant qui n’était entâché par rien, comme trop peu souvent.

-Mère est dangereuse, finit-il par dire, dans un murmure.

Par réflexe, Antropy s’interrompit, ses doigts en suspend. Carlisle secoua malgré lui la tête, plongeant ses yeux dans les siens. Carlisle ne suppliait jamais. Jamais il n’implorait. Pourtant en cet instant, il le conjurait de jouer.

-Elle utilisera Tasha contre moi, reprit-il doucement, au son de la guitare.Mère a… Toujours été extrêmement douée pour comprendre comment détruire les gens.

Il n’avait encore jamais raconté l’ampleur des sévices qu’il avait subit, lui et ses sœurs, à quiconque. Même Schubner n’en connaissait que de vagues passages, des bribes laisser échappé ou des explications pour quelques cicatrices.

-… Tasha et toi êtes les deux seuls êtres à être parvenu à entrer dans mon coeur. Et pour ça, Mère tentera de vous utilisez contre moi. Elle sait que je ferais n’importe quoi pour que rien ne vous arrive. Et c’est une arme redoutable.

Il eue un soupir, passant sa main sur son front un instant, avant de caresser sa lèvre du pouce. Il savait qu’Antropy ne se contenterait pas d’une simple métaphore. Le rouquin pouvait être aussi tenace que lui sur certaines choses, bien que Carlisle su que jamais, il ne le forcerait à parler de cela contre son gré. Il prit une grande inspiration, avant de se redresser légèrement.

-Mère ne se contentait pas de nous frapper. Elle usait de bien plus de… Finesse. Elle a vite comprit que les coups laissaient des traces et qu’à la longue, cela finirait par se voir et se savoir. J’ignore ce qui l’a poussé à changer de mode opératoire : l’idée de perdre la face auprès de ses voisins en devenant une ‘mère violente’ ou l’idée de perdre ses jouets préférés.

Le visage d’Antropy se tordit légèrement et Carlisle put presque entendre la fausse note qui ne vint pas, se contentant de hausser les épaules, négligemment.

-Elle a donc choisit de s’amuser… Autrement. En nous détruisant mentalement. Elle a apprit à cerner la moindre de nos faiblesses, la moindre de nos failles pour les user contre nous. Indiana, ce fut son incapacité, en tant qu’aînée, à nous protéger. Mère s’arrangeait toujours pour nous faire subir les pires punitions en son absence, comme si le simple fait d’être libre pour elle signifiait nous condamner, Avie et moi. C’est ce qui l’a empêcher de quitter le Manoir de nombreuses années… Pour Avie, ce fût sa crainte de l’imperfection. Avie possède naturellement un esprit monofocal et hypersensible, Mère s’est contenter… D’accentuer ce trait de caractère en la rabaissant sans cesse, en la comparant à tout et tous. Sans cesse. Au point de lui faire croire qu’elle n’était rien, et ne serait jamais rien. J’ai mis près de dix ans à parvenir à lui faire prendre conscience de sa propre valeur!

Il ferma les yeux, s’interrompant lui même dans son exclamation, ne les rouvrant que pour s’excuser du regard, alors même que le silence était revenu prendre ses droits. Antropy le fixait, l’air horrifié et pourtant, il n’avait apprit que peu de l’entière vérité.

-Moi, ce fut autre chose. Elle me nia entièrement. Elle n’a jamais prononcé mon prénom de toute ma vie avant que nous nous voyions devant le juge. Les rares fois où elle s’adressa à moi, ce fut en m’appelant par le prénom de mon père, Richard. Pour l’essentiel elle fit comme si elle n’avait jamais eue de fils. Ce qui me fit porter la responsabilité d’être incapable de protéger mes sœurs ou de prendre des coups pour elles. J’étais… Impuissant. Totalement impuissant.

Il eue un soupir, nerveux, se recoiffant sans vraiment s’en rendre compte.

-Et c’est exactement ce qu’elle tente de faire avec Tasha, conclut-il, un peu rapidement. Tout ce qu’elle souhaite, c’est me l’enlever afin de me rendre impuissant et de la tourner contre moi. Cette simple menace suffirait à… Me faire faire des folies inconsidérées.

Et il savait déjà exactement lesquelles.
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________________________________________ 2018-09-27, 22:23


Mama knows Best


Ecouter Carlisle parler de lui de cette manière avait quelque chose… de perturbant. De hautement important et de lourd, mais aussi d’étrangement dérangeant en soi. Je savais qu’il avait souffert dans son adolescence et son enfance, il ne fallait pas être psychiatre diplômé pour comprendre que quelque chose l’avait flingué jusqu’à la moelle et qu’il ne parvenait pas franchement à s’en remettre. Je l’avais rencontré à une époque où rien ne pouvait l’approcher ni l’atteindre, où le moindre contact signifiait l’attaque et la plus petite provocation se soldait par ma mort directe et imminente. Il avait bien changé aujourd’hui. Plus calme. Plus… Humain, sans doute. Un fléau pour lui, une bénédiction à mes yeux que d’entendre battre son cœur sous son torse et de pouvoir l’enlacer en m’endormant. C’était peut-être stupide, mais j’avais mis du temps à lui faire accepter cette habitude.

Carlisle était mon tout, comme je représentait sans doute le sien. Un peu comme dans Les Mondes de Ralph, où la boite de Vaneloppe était maintenue hors des autres dans une bulle qui n’appartenait qu’à elle. Nous étions cette bulle. Cet espace exclusif et personnel, intime, où personne ne pouvait entrer sans notre consentement. Ni ses sœurs. Ni sa mère. Ni personne d’indésirable. Une bulle familial, un noyau plus solide que le roc où il acceptait enfin de se confier un peu sur ce qu’il renfermait en lui. Dire que j’appréciai ses paroles aurait été un mensonge, je n’aimais pas du tout ce qu’il était en train de me raconter et j’avais la douloureuse envie de retourner au manoir faire avaler des couleurs à sa génitrice. Mais ça aurait été le déconsidéré et ne pas reconnaître la force dont il était pourvu pour surmonter cela. Il y était parvenu, à sa manière. Il grandissait et s’extirpait de ses griffes.

Restait à le maintenir à bonne distance de ses gourous.

J’avais la guitare pour bouclier et le cœur serré en l’écoutant délivrer ce poids de sa conscience. Le partager un peu plus qu’il ne le faisait déjà, attentif et silencieux même s’il m’était difficile de ne pas intervenir. Parfois il fallait apprendre à se taire et c’était un exemple parfait pour cela. Mes doigts pinçant parfois les cordes, je mourrais d’envie d’arrêter mais j’avais bien conscience que cela ne lui ferait pas de bien. Je buvais ses paroles, tentais de m’en imprégner sans en être trop marqué, maintenais une certaine distance entre mes réactions et la découverte des sévices que cette femme leur avait fait subir… Je finis par ne plus pouvoir jouer, trop tremblant d’une adrénaline malsaine pour cela. Terriblement tendu d’imaginer un seul instant la main de sa mère en train de lui faire du mal, ou de s’en prendre à Evanora et Indiana. Je n’aimais pas ces femmes, je les détestais même, pourtant je ne leur souhaitais pas cela. Personne ne méritais de vivre ça. Personne, encore moins des enfants.

Et elle escomptait se servir de Tasha pour continuer ses manigances ? Mais j’allais la tuer, sérieusement ! A la simple idée que mon bébé se retrouve entre ses pattes griffues, j’eu envie d’exploser quelque chose. Carlisle était franchement calme pour quelqu’un qui contenait tant de haine et de rancœur, chapeau l’artiste ! Parce que je n’aurais pas été capable de dissimuler ça aussi bien que lui. J’étais trop honnête soi-disant, trop spontané pour me contenir de la sorte. Devoir faire mine de ne pas la haïr m’avait déjà coûté, pour quelques heures, alors toute une vie… Bordel, mais dans quel monde vivait-on ? J’espérai très fort que Blue allait en faire son quatre-heures rapidement. Cette femme ne méritait même pas d’exister ou de se faire appeler mère par qui que ce soit. Ce n’était pas une mère. Ca ne l’avait jamais été… Espèce de psychopathe !

« Elle ne l’aura pas. » Commentai-je après un long silence, brisant ce dernier qui s’était pourtant bien tranquillement installé. « Elle n’aura pas Tasha. Elle n’avait pas d’adversaire quand il s’agissait de s’en prendre à vous, et vous n’étiez que des enfants. Mais désormais vous n’êtes plus sous son toit, vous ne dépendez plus d’elle, tu es devenu adulte et tu n’es plus obligé de lui obéir. Elle ne viendra plus te hanter la nuit ou s’en prendre à toi ici, Carlisle. Elle ne s’approchera pas de Tasha, j’y veillerai comme je sais que tu y veilleras. J’ai raison ? »

J’avais du mal à mettre de l’ordre dans mes pensées, chamboulé entre l’envie sirupeuse de l’insulter de tous les noms cette garce de rousse psychotique et celle de le serrer dans mes bras pour lui promettre que rien de mal n’arriverait à notre fille. C’était une promesse que je ne pouvais pas tenir, que je ne pouvais pas prévoir, mais je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour qu’elle ne soit jamais brisée volontairement. Je refusais la simple idée de lui laisser notre enfant et de la voir s’en servir comme d’une arme contre lui. Tasha n’était peut-être pas son sang, mais elle représentait la chair de son cœur. L’enveloppe de ses sentiments. L’amour dont il avait été privé et qu’il recevait sans attendre de retour désormais. Elle était son humanité et sa confiance réunie. Personne ne toucherait à eux. Personne, sinon il faudrait me passer sur le corps – et j’étais plutôt résistant comme tigre !

Je repoussai la guitare pour de bon cette fois, me penchant en avant pour la déposer prudemment sur le tapis et ramenai ensuite mes pieds sur le canapé. Je n’avais pas bougé de ma place, l’observant engoncé contre l’accoudoir, mais je mis tranquillement mon bras sous mon menton. Carlisle était de ceux qui se libéraient à leur rythme et, même si mes paroles avaient vocation de vouloir le rassurer, je savais que le doute ne le quitterait pas un instant. Il était suffisamment censé pour savoir que sa mère ne pourrait plus l’atteindre de la même manière, mais aussi suffisamment effrayé pour comprendre qu’elle possédait désormais de nouveaux moyens de pression. Restait à ne pas lui permettre de mettre la main dessus avant qu’il ne soit trop tard.

« Peut-être qu’elle imagine que tu es toujours aussi effrayé par ce qu’elle t’as fait subir ? Ou peut-être qu’elle sait que personne ne te croira si tu venais un jour à en parler ? » Demandai-je au bout d’un moment, mes yeux observant son profil distingué. Fatigué. « Tu es devenu fort pour ne plus avoir à dépendre de personne. Tu es devenu une forteresse pour que plus jamais rien ne t’atteigne. Tu es devenu un homme de l’ombre pour qu’on te craigne plutôt que d’être craint. Et tu t’exposes au grand jour dans la haute société pour qu’on se souvienne tous de ton nom. Celui d’un mécène dans les galeries d’art et les musées. Celui d’un militaire. Celui d’un aristocrate bourgeois distingué… Tu es devenu le meilleur de ce qui aurait pu advenir.  »

Il n’avait pas pris le mauvais pour s’y tapir et devenir une larve de terreur et de folie, non. Il s’était redressé, avait encaissé les coups et les souffrances, pour devenir quelqu’un de fort. D’indestructible. D’inatteignable sous ses barrières et ses menaces. Il s’était forgé une carapace aussi épaisse que dangereuse… Et derrière, un cœur. Meurtri. Affaibli. Transformé en pierre et réchauffer à notre contact désormais. Ce cœur, il était hors de question que quiconque y touche.

« Et tu n’as pas répété les erreurs qu’elle a voulu t’inculquer. » Rajoutai-je, voyant ses sourcils se froncer avant de se hausser comme si j’avais dit une ânerie. « Toi, tu es devenu un père. Quand elle n’a jamais été capable d’être une mère pour vous. »

Tasha l’aimait. D’un amour démesuré qu’on ne réserve qu’à sa famille. D’un amour aveugle, d’une confiance totale et d’un dévouement exemplaire. Elle lui confierait sa vie, ses idées et ses pensées, sans même se poser de question. Parce qu’elle se considérait autant comme sa fille que comme la mienne. Et ça, c’était une chose que sa famille n’aurait pas de sitôt.

Je tendis la main pour serrer posément la sienne. Sentir ses doigts enlacés aux miens. Presser sa peau à même ma paume. L’encourager, malgré tout. Lui faire comprendre qu’il pouvait s’en sortir, et nous avec.

« Je t’aime, Carlisle. Je t’aime comme tu es, comme tu seras et comme tu as été. Elle t’a blessé. Elle t’a torturé. Mais elle ne t’as pas brisé. Tu es là. On protègera Tasha et, si jamais tu as peur de ne plus penser correctement, alors je te remettrai les yeux en face des trous. On est tous les deux, dans les bons comme les mauvais jours, dans la santé et la maladie, dans la vie et dans la mort… Dans le bien comme dans le mal. Tu te rappelles ? »

J’esquissai un sourire encourageant, faisant tourner mon alliance quand lui ne portait pas la sienne. Par obligation. Par sécurité. Qu’importait, il avait prononcé ces mots et ils restaient gravés dans ma mémoire, comme tout le reste de ce que nous avions vécu. Ou presque.

« Ca va aller. Tout ira bien. Parce que tu n’es plus seul, okay ? »
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________________________________________ 2018-09-29, 09:42

Mama is back } Antropy & Carlisle - Page 2 B1cc45778737c174128333a09bff6f0dMama is back } Antropy & Carlisle - Page 2 Ed-sheeran-gif-love-singer-Favim.com-2651571
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Dire qu’il s’agissait de toute ce que Carlisle avait toujours voulu entendre aurait sans doute été exagéré, mais il ne put s’empêcher de ressentir un profond soulagement à ses mots. Comme si, quelque part, Antropy été parvenu à combler, d’une simple paire de phrases, toutes les angoisses infantiles et les complexes adolescents qu’il avait pu avoir. Certes, ils ne disparaîtraient pas comme par magie en une soirée, en un aveux, en une promesse mais… Quelque part, au fond de lui, Carlisle se sentit un peu… Rassuré. C’était étrange. Lui qui n’avait jamais ressenti le besoin de l’être, lui qui avait même fuit ces formules pataudes et maladroites qui n’avaient pour but que de minimiser les faits et d’apaiser les esprits trop faibles pour affronter leurs destins, ressentait soudain un intense soulagement. Comme si l’on avait, simplement, retirer de ses épaules un bagage trop lourd, installé là depuis trop longtemps…

Lentement, il finit par tourner le visage vers lui, ses doigts caressant tendrement les siens. C’était tout simple, et pourtant… Un sourire triste vint sur son visage, sa main finissant par se tendre pour venir caresser sa joue, Antropy venant lover son visage au creux de sa paume. Y avait-il sur Terre une âme plus simple et généreuse que la sienne ? Parfois Carlisle en doutait sincèrement. Lui qui n’avait jamais eu autour de lui que des êtres abjectes de cupidités, violents de haine, bouffis d’orgueil, dévorés par l’égoïsme, se surprenait encore à voir en ce simple rouquin l’être le plus bon qu’il eu jamais rencontrer. Certes, doublé d’un sacré caractère, d’un enfantillage exaspérant et parfois d’une énergie un peu trop vive pour prôner la prudence mais… Antropy était bon. Tout simplement.

-Tu penses vraiment que je suis un bon père?

Il n’en doutait pas, à ses propres yeux. Il élevait Tasha comme cela lui semblait être le mieux, lui assurait la meilleure éducation, la plus diversifiée, pourvoyait à ses besoins quels qu’ils soient, lui offraient cadeaux et récompenses quand elle le méritait, et demeurait ferme quand il s’agissait de la ‘punir’ même si Carlisle en ressentait toujours une grande honte et une infinie tristesse. Mais il n’avait jamais rien demandé de ce qu’Antropy en pensait. Etait-il un bon père ou simplement une autre de ces pauvres âmes tentant de faire au mieux mais n’y parvenant que parfois ? Même si Carlisle était un homme ayant une haute opinion de lui même et ne requérant l’avis de personne pour savoir ce qu’il valait… Il était important pour lui de savoir qu’Antropy approuvait ses choix.

La réponse d’Antropy fusa immédiatement, dans un étrange mélange d’évidence outrancière, de douceur calme et d’un peu de ce ton qu’il usait quand il était dépassé par ce que Carlisle pouvait lui demander. Carlisle en sourit, amusé, apaisé également. Et à cet instant, il prit la résolution que jamais il ne laisserait Mère s’approcher à nouveau d’eux. Elle avait presque réussi, lorsqu’elle avait soudoyé Louis pour tuer Antropy mais Carlisle ne tolérerait pas que la même erreur soit commise deux fois. Il redoublerait de prudence. La ferait surveiller nuit et jour. Serait intransigeant. Peut-être insupportable aux yeux d’Antropy mais il ne permettrait pas à ce serpent de venir envenimé ce qu’il avait mit tant de temps à construire. Sa famille. Jamais elle ne parviendrait à mettre son ombre griffue sur son bonheur.

Doucement, Carlisle se tourna vers la table basse, avisant la télécommande qui reposait parmi tant d’autres avant de la pointer vers l’avant. Sans un son, le voyant lumineux de la discrète mais puissante chaîne hi-fi qu’ils avaient achetés il y avait peu, réglant immédiatement le volume afin de ne pas réveiller Tasha. Cette enfant, comme son père, adorait dansé, et Carlisle en avait fait l’expérience quand, à 23h30, elle s’était extirpé de son lit pour venir ‘danser avec Papa’ quand Antropy lui avait fait écouter sa nouvelle composition. Antropy eue une moue, visiblement surpris, mais Carlisle se leva du canapé, cependant qu’un air de jazz épais mais tendre ronronnait doucement.

-Puis-je?

Une demande simple, la main tendue, un léger sourire aux lèvres. Carlisle était un danseur né. Il avait toujours aimé cela, bien que Mère eue réprimé ce talent bien vite, menaçant de lui briser les jambes si il s’avisait même d’y songer. Il avait perdu le compte des coups de canne qu’elle lui avait infligé, le forçant adolescent à fuir dans quelques bars dansant pour pouvoir simplement se mouvoir au son de la musique, mais cela aussi, il avait finit par l’abandonner. Trop de luxure. Trop de demande à demi-mots. On l’avait longtemps prit pour un prostitué, puis un homosexuel refoulé, avant de carrément lui faire des propositions indécentes qui avaient finit avec des dents en moins et quelques os fêlés. Carlisle était un adolescent sauvage, à l’époque, et danser n’était alors bon qu’à mettre le feu au poudre, tout comme le groupe de rock qu’il avait finit par monté avec ses sœurs.

Mais en cet instant, sentir le corps d’Antropy frôler le sien sans la moindre intention autre que partager sa chaleur, sentir sa main au creux de ses reins dans une simple promesse de protection, aller et venir d’un pieds sur l’autre, dans des mouvements lents et doux, sans autre prétention que celle de, pour un temps, danser avec l’homme qu’il aimait et qu’il avait épousé… Etait la plus merveilleuse des sensations. Une sensation tendre et lente, douce et amère, amoureusement passionnée que rien ne pouvait détruire. En cet instant, ils étaient invincibles. Hors du temps. Hors de tout. Hors de ce monde pourri que Carlisle ne connaissait que trop…

-Je t’aime, murmura-t-il doucement, à son oreille, ne reculant que pour venir quérir ses lèvres, dans un simple baiser.

Quelqu’un avait un jour dit que la danse était un langage, une promesse sans mots pour deux êtres de ne former qu’un, l’espace d’une chanson. Carlisle espérait que sa vie entière en serait la partition et que, malgré les accros et le papier de mauvaise qualité sur laquelle elle était imprimé, que jamais cette musique là ne cesserait d’être joué.
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________________________________________ 2018-10-04, 23:20


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Danser. Carlisle aimait danser et moi j’aimais Carlisle alors, je suivais. J’avais appris pour lui ce genre de pas plus calme que la moyenne, ces pas qui nous avaient valus notre première fois comme notre dernière mort accidentelle – dirons-nous. J’avais pris des cours en compagnie de Maria pour le surprendre, pour faire un peu autre chose que de simplement rapper et pour ne pas avoir l’air trop décalé dans la soirée qui avait suivie. J’avais même mis un costume trois pièces – sans la veste, fallait pas déconner – pour l’occasion ! Comme quoi à l’époque il me plaisait déjà vraiment. Suffisamment pour ce genre d’efforts. Complètement pour supporter ses accès de colère et de jalousie enfouie. Viscéralement pour franchir la dernière barrière de bienséance, dégrafer sa chemise avec violence et même le mordre pendant ce dernier contact. Le tout premier d’une liste chaotique et tumultueuse, jusqu’à aujourd’hui. Jusqu’à ce soir où nous dansions pour tenter de rassurer son âme et apaiser son cœur.

J’esquissai un sourire à son aveu et me mordit l’intérieur de la joue pour m’éviter un commentaire graveleux qui n’avait pas sa place ici. Distingué, une étiquette sur la peau et des bonnes manières inscrites dans les gènes, j’avais suffisamment perturbé mon mari pour lui accorder un moment de tranquillité ; sa mère était une excellente excuse pour ne pas venir trop le titiller. Et puis, pour une fois qu’il s’ouvrait un peu plus sur ce passé glauque qui habitait ses souvenirs… C’était un début. Une parcelle unique de ce qu’il était et de ce qu’il aurait pu devenir s’il n’avait pas croisé ma route. Parfois, je me félicitais d’avoir été aussi insistant et têtu à son encontre ; peut-être qu’il aurait une autre existence qui le satisferait, mais je savais qu’au fond il aimait la vie que nous avions désormais. Elle n’était ni parfaite ni idéale, mais au moins nous étions ensemble envers et contre tout.

Lorsque je fermai les yeux ce soir là, calé dans son dos comme à mon habitude, je me laissais envahir par les souvenirs de cette journée et les songes d’un avenir qui pourrait se trouver sans nuage... Ou presque. Au mieux nous n’aurions plus à affronter sa mère puisqu’elle n’existerait plus, mais au pire il nous faudrait supporter l’idée de la laisser en compagnie d’un assistant social et de cette femme machiavélique. Espérons que notre fille ne se prenne pas la délicieuse idée de l’imiter, ça serait le comble de la malchance !

J’inspirai profondément, humant l’odeur familière de ses cheveux à la sortie de la douche. Il sentait quelque chose de boisé et un petit indice plus fleuri qui me rappelait… Quelque chose… De lointain. De très lointain et d’enfoui. Je fronçai les sourcils en rouvrant les yeux, me redressant légèrement. Les lueurs de la lune se reflétaient sur le mur et un peu sur lui et son tee-shirt gris, pourtant je ressentis une impression désagréable. Un retournement de trippes plus tard et je sentis mon souffle se raréfier tandis que l’odeur de rose s’insinuait dans chaque parcelle de ma peau. La plus petite cellule. Le plus petit souvenir de… De quoi, exactement ?

Mes doigts se crispèrent et je tentais de le lâcher, de reculer. De m’asseoir et me ressaisir. Mais une main saisit mon poignet et m’empêcha de mettre une distance nécessaire entre nous. Ses doigts serraient fort. Un peu trop fort. Je couinai un gargouillis désabusé en tentant vainement de retirer mon bras, susurrant son nom sans qu’aucun son ne sorte vraiment de ma gorge. Il bougea. Tourna. Je sentis mon sang quitter mon visage et un frisson de terreur s’emparer de mon échine lorsque le rire narquois résonna autour de moi. Une face étrangère mais pas inconnue. Des yeux vipérins et une cicatrice sur le côté de la joue.

Louis.

Paralysé d’une terreur soudaine, je fus incapable d’esquisser le moindre mouvement de fuite alors que mon corps me hurlait de déguerpir. Je devais partir d’ici ! Je devais… Il fallait que j’aille chercher Carlisle ! Que j’aille… Pourquoi Louis était là ? Pourquoi avais-je si peur de lui ? Pourquoi est-ce qu’il… Je sentis sa main entravant mon poignet tirer violemment et me le tordre. Sa paume se plaqua alors avec une brutalité propre sur ma gorge et me projeta contre le matelas, étouffant tout espoir de bouger comme de respirer. Son poids s’affala sur le mien, son genou bloqua mon abdomen et son pouce caressa un instant mon cou avant de serrer. De serrer comme si de rien était. De serrer en m’observant, cet air prodigieusement satisfait sur le visage. De serrer à m’en faire hoqueter, recherchant un air que je ne parvenais pas à reprendre.

Je me débattis. Battant des jambes, arquant mon bras libre pour espérer lui griffer le visage ou quelque chose. Tenter de le faire relâcher cette pression qui étouffait mon corps. Ma bouche s’ouvrait dans un hurlement qui ne venait pas, impuissant, incapable. Ma vision se brouilla petit à petit, mon sang sembla se glacer dans mes veines et j’eu la sensation de milliers de lames traversant ma chair de part en part en même temps. Est-ce que j’allais mourir ? Est-ce que Carlisle allait s’inquiéter ? Est-ce que…

Je poussai un hurlement à m’en rompre les cordes vocales, sentant tout mon poids basculer sur le côté et glisser jusqu’à cogner contre la dureté du sol. Les draps entravaient mes mouvements et je me dépêchai de m’en débarrasser, à bout de souffle, à bout de nerf, à bout de tout y compris de patience. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine à l’en transpercer, me filant un tournis de tous les diables alors que le seul mot qui me vint immédiatement à l’esprit fut :

« … Car… Carlisle ?! »

Il fallait que je le vois. Il fallait que je… Fasse cesser cette panique ou je… Je ne…

« Carlisle ?!! »

« Carlisle n’est plus ici. »

Mon cri s’étouffa dans un aigu dénaturé tandis que je tournai la tête pour rencontrer le regard d’Elisabeth. Fière, digne, évidente dans sa robe sombre et ses cheveux roux, elle tenait à la main une lame entachée. Entachée de… De quoi ?!

« Il n’est plus ici. Il a voulu s’interposer, tu comprends ? »

De quoi est-ce que… Recroquevillé près du lit je tentai de me redresser sans y parvenir, cherchant à tâtons le rebord mais mes muscles semblaient avoir rendus les armes eux-aussi. Je la détaillai en haletant. A la lueur de la nuit, Elisabeth semblait encore plus terrifiante. Elle baissa les yeux vers sa main et tourna lentement le couteau dans sa paume. Il était coloré d’un étrange liquide dont plusieurs gouttes glissèrent sur le sol à son mouvement. Qu’est-ce que c’était que ça ? Est-ce que c'était du sang? Mais... Le sang de QUI ?

« Tu comprend, n’est-ce pas ? » Insista-t-elle en reportant son attention sur moi. « Personne ne doit jamais s’interposer entre une mère et son fils. »

Elle fit un pas et je lui hurlais de ne pas s’approcher. Elle s’arrêta, l’air contrite.

« Dommage qu’elle ai vu ça, elle aurait fait une parfaite petite fille… Et maintenant c’est toi. C’est toi qui te met en travers de ma route. Pourquoi est-ce que personne ne comprend ? »

Comprendre quoi exactement ? Qu’elle était complètement tarée ? Mais évidemment qu’elle l’était !

« Toi aussi tu ne comprends pas. J’ai dû faire ce qu’il fallait. Il n’y a que par le sang que ça s’arrêtera. »

Le sang ? le sang de qui ?! Bordel mais qu’est-ce qu’elle faisait chez moi et… Qu’est-ce qu’elle foutait, bordel ?! Je la vis soudain se diriger complètement vers moi, son arme brandit au-dessus de sa tête et ses yeux fixant quelque chose sur moi. Je reculai au possible, priai pour me relever mais à la place Elisabeth Evil s’affala de tout son poids sur moi. Leva son bras. Et l’abaissa en plein sur mon torse.

Le cri que je poussai me vrilla mes propres tympans quand, dans un sursaut venu d’on ne savait où, je bondis hors du lit où je m’étais couché avec Carlisle quelques heures plus tôt… Je trébuchai sur le sol et m’affalai en avant, sentit ma tête cogner contre quelque chose et ma vision encore incertaine me soma de ne pas perdre connaissance. Je gémis en portant mes paumes vers mon crâne et me tournai sur le flanc, traversé par la douleur de ma maladresse.

Ce ne fut que lorsque j’entendis la voix de Carlisle que je su que j’étais enfin sorti du cauchemar.
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________________________________________ 2018-10-07, 18:39

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’Cause inside I’m ugly, ulgy like her.

S’allonger simplement avec Antropy était une chose que Carlisle n’aurait jamais cru pouvoir être si rassurante. Bien sûr, en bon gentleman de son rang, il savait occupé ses soirées comme celles d’un homme de bonne société, lisant et se documentant, pratiquant et jouant, s’occupant avec un amour infini de sa fille jusqu’à une heure raisonnable, allant à l’Opéra, au théâtre, ou encore allant nager ou courir. Mais rien ne l’emplissait à ce point d’apaisement que ce simple geste qu’avait systématiquement Antropy à son contact, se glissant dans son dos, entourant ses hanches avec une possessivité douce et tendre, aimante. Carlisle n’avait jamais été très démonstratif. Son monde tout entier était fait de sous-entendus, de murmures, de gestes à demi-mots, mais il devait avouer que ces attentions qu’Antropy pouvait avoir lui faisait énormément de bien, dans l’intimité de leurs chambres, dans la tendresse de leurs draps.

Il mit un peu de temps à s’endormir, comme toujours, tendant l’oreille dans le noir pour entendre le moindre son suspect, la moindre intrusion, la moindre imperfection qui l’aurait fait se relever pour vérifier que sa famille était en sécurité. Sa famille… Un sentiment doux amer l’emplissait sans cesse à la pensée de ce mot, déchiré entre le passé et le présent, entre les souvenirs et l’avenir. En fonds, loin, il pouvait entendre la respiration de Tasha, lente et profonde, et parfois le roulis tintant de l’un des grelots de ses peluches, quand elle se tournait dans son sommeil. Carlisle haïssait ces peluches qui le réveillait à multiples reprises durant la nuit, dans de faux sursauts mais Tasha lui avait expliqué qu’il s’agissait de coeurs de fées, et il n’avait pu, au final, que s’incliner.

Il mit en revanche beaucoup moins longtemps à se redresser quand il sentit Antropy s’agiter, pas assez cependant pour l’empêcher de glisser hors des draps et de tomber la tête la première sur le sol. En quelques gestes, il rejeta les draps, venant aussitôt prendre le visage d’Antropy entre ses mains, l’appelant fermement.

-Antropy ? Antropy ! Ouvre les yeux, ce n’est qu’un rêve!

Il vit ses yeux papillonner, ses paupières battant furieusement comme si elles luttaient pour le maintenir conscient, éveillé.

-Antropy, ce n’est qu’un rêve. Ce n’est qu’un rêve, je suis là.

Le front d’Antropy était moite de sueur, son souffle saccadé et chaud. Sa main agrippa maladroitement l’un des poignets de Carlisle, serrant comme pour se raccrocher à quelque chose, un instant, un moment. Une réalité. Il lui fallut quelques autres secondes avant d’enfin émerger totalement, son souffle s’apaisant tout en restant rapide. Doucement, Carlisle passa ses pouces sur ses joues, dans des caresses apaisantes, simples. Tendres. Patientes.

-Je suis là Antropy. Ce n’était qu’un rêve.

Il le vit hocher la tête, les yeux clos, et après un instant, il finit par relâcher son visage, se redressant légèrement.

-Viens avec moi, murmura-t-il, lui tendant la main pour le guider, tranquillement, jusqu’à la salle de bain pour mieux examiner son front.

La lumière du plafonnier fit grogner Antropy, qui se frotta les yeux mais Carlisle avait besoin d’y voir plus clair. Rapidement, il le fit asseoir, soulevant ses mèches détrempées pour observer sa tempe, rougit par le coup. Doucement, il palpa son front, vérifia les os, les yeux aussi. Heureusement, rien à signaler, même si Carlisle insista pour aller chercher de la glace et un torchon, les appliquant sur sa peau pour résorber la bosse qui se formait déjà. Ce qui eue aussi l’effet de faire à nouveau grogner Antropy, avec véhemence.

-Tu t’es cogné, mein Hertz, il faut au moins faire cela.

Il l’avait appeler ainsi machinalement, sans y faire attention, trop absorbé par sa bosse pour s’en rendre compte. Il garda la compresse un moment, avant de la retirer, vérifiant l’aspect de la peau avant d’enfin le regarder à nouveau dans les yeux. Il avait des cernes et la peau terreuse.

-De quoi as-tu rêvé pour avoir si peur?

Le ton était doux, pas le moins du monde inquisiteur, simple. Pourtant, la grimace que fit Antropy fut vive, et Carlisle eue un demi-sourire, posant sa main sur sa joue.

-Je ne te forcerais pas à en parler, Antropy. Si tu ne veux pas, je comprendrais.

Lui même, quand cela arrivait encore, avait des cauchemars vifs, et il répugnait à les raconter, résurgences d’horribles souvenirs et d’angoisses meurtrières. Il caressa sa joue, encore, se penchant pour embrasser son front avant de sourire doucement.

-Tu n’as pas l’air d’avoir de commotion ni de fractures, mais tu devrais rester assis le plus possible demain, est-ce comprit ? Et normalement, après une telle chute, je devrais vérifier que tu ne perds pas connaissances pour être sûr.

Il l’avait dit à voix haute, comblant le vide angoissé qui émanait de son compagnon, qu’il voyait déjà froisser le linge dans lequel se trouvait la glace. Une chose était sûre, il ne semblait absolument pas enclin à retourner se coucher, et Carlisle ne s’aviserait pas de le laisser seul, à errer dans des souvenirs et des images. Il eue un sourire, semblant réfléchir, avant de tourner la tête vers la baignoire.

-Un bain de minuit te ferait-il du bien? proposa-t-il simplement, tendant la main vers lui, caressant son front moite.

Même si cela sembla le surprendre, Antropy finit par hocher la tête, un demi-sourire aux lèvres. Carlisle hocha la tête, traversant l’espace entre lui et la baignoire à sabot blanche, pour en ouvrir les robinets. Carlisle n’avait jamais été très porté sur les bains, préférant une douche rapide et efficace, mais il avait dans ses tiroirs des dizaines de sels de bains différents, venant d’autant de spas que de pays, et possédant chacun des vertus propres. Il prit les plus épais, des gros cristaux de sels à la légère odeur de menthe poivrée, dont il déposa le bocal sur le rebords du bain, avant d’y verser une lourde cuillerée, dans un petit clapotis. Il prit également des roses de bains, une brosse exfoliante, quelques autres ustensiles de bien être, avant de se tourner vers Antropy, qui l’observait, la tête légèrement penchée sur le côté.

-Si Monsieur veut bien se donner la peine, fit-il, amusé, revenant vers lui avant de déposer un chaste mais tendre baiser sur ses lèvres, je me ferais un devoir de vous détendre. Monsieur.
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________________________________________ 2018-10-09, 20:40


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Carlisle était peut-être un grand bandit internationnal ou un père de la pègre actuelle… Il n’en restait pas moins quelqu’un qui savait très bien analyser les personnes en face de lui et qui savait, à force d’efforts, utiliser ces informations pour faire quelque chose de bien. Lui si habitué à trouver les faiblesses des autres, à repérer leurs points faibles pour les utiliser contre eux, voilà qu’il pouvait deviner mon état d’esprit et me permettre de penser à autre chose. Je n’aimais pas les cauchemars, je n’en faisaist pas souvent mais c’était souvent la même problématique qui se répétait en boucle : Carlisle n’était plus là. Remplacé par quelqu’un d’autre ou simplement absent. Parfois je revoyais Louis, d’autres fois c’était simplement une silhouette qui essayait de m’assassiner. J’ignorais d’où ils venaient mais… A chaque fois je ne pouvais m’empêcher de songer à Sebastian ; et à tous les efforts qu’il faisait pour me protéger. Je ne pouvais lui en vouloir de laisser passer quelques mauvais rêves.

J’aimerais juste qu’ils ne reviennent jamais.

J’esquissai un sourire en observant mon compagnon faire, ne bougeant pas de ma place sans retenir la grimace qui me prenait dès que je tournais la tête d’un côté ou de l’autre. J’avais quand même sacrément cogné le sol dans mon élan… A sa proposition j’eu clairement un sourire et, sans me faire prier, je levais les bras vers le ciel. Il mit quelques secondes avant de me comprendre et je me trémoussai quelque peu pour l’aider à me retirer ce tee-shirt qui me servait de pyjama actuellement. Lorsque je posai mes mains sur lui, je ne lui laissai pas non plus le choix de la suite : il venait avec moi ou je n’irais pas dans ce bain. S’il y avait bien une chose qui me détendait à fond… C’était ça !

« Toi, tu sais exactement comment me parler… »

Je lui lançai un regard entendu sous mon sourire goguenard.

Malgré l’heure avancée de la nuit et les cernes sous nos yeux, nous nous glissâmes finalement dans l’eau chaude montant tranquillement au cœur de la baignoire et j’inspirai profondément les volutes s’extirpant de la légère mousse. Je pouvais compter sur lui pour savoir quoi mettre dans l’eau pour nous faire du bien. M’installant confortablement contre son torse, je me laissai bercé par le rythme de sa respiration et les caresses distraites de ses mains sur mes bras. Quelques minutes permirent d’emplir l’air d’une chaleur agréable et je fermai même les yeux pour chercher un peu de paix. Profiter de ce salut qu’il nous offrait.

« Ca, c’est le meilleur anti-cauchemar qui puisse exister ! On devrait faire ça plus souvent, tu crois pas ? Bon, pas en plein milieu de la nuit mais… C’est pas mal du tout. Il ne manque que de la musique mais ça serait réveiller Tasha alors vaut mieux pas tenter. »

Je fus tiré de mes pensées par ses doigts se posant sur mes épaules et je me tendis un court instant… Avant d’expirer longuement. Ses paumes attendirent avant de commencer à masser lentement mais fermement mes muscles encore bien trop tendus. Décidément, j’avais droit au meilleur des traitements de faveur !

Etendant un peu plus mes jambes dans la baignoire, je me laissai aller à complètement subir et apprécier ses gestes sur moi. Ses grandes mains étaient passées maîtresses dans l’art de savoir exactement où appuyer, où presser et les mouvements à faire pour que mon dos se relâche complètement. Si Carlisle appréciait encore plus les massages que moi, je n’allais sûrement pas le refuser. Perdus au milieu de la nuit, voilà bien une bulle où j’aurais aimé rester indéfiniment.

« Rappelle-moi où tu as appris les massages ? »

Murmurai-je après un moment, relevant le nez et le menton vers lui. Je croisai son regard, observai sa bouche s’ouvrir pour me répondre, et ne pu m’empêcher de déposer un baiser contre sa mâchoire carrée.

« Je t’en ferais un après si tu veux… Je sais à quel point tu ne peux pas me résister quand je commence ! »

Non pas que j’ai besoin de ce subterfuge pour l’attirer dans mes maigres filets mais… il n’y avait pas de mal à se faire du bien, n’est-ce pas ? J’embrassai à nouveau sa peau et me redressai un peu plus pour attendre plus aisément sa bouche dans un long baiser tendre. Attentif. Silencieux mais tellement lourd de sens et de mots. Ses mains quittèrent mon dos pour se poser sur mes flancs, timides, jusqu’à ce que je les attrape pour qu’elles enlacent ma taille. J’adorais le sentir contre moi. J’adorais l’avoir avec moi dans le plus simple appareil, comme si rien ne pouvait venir nous pourrir l’existence ici. Ca me rappelait les bassins du Nigeria, la nature en moins et la fraicheur oubliée…

Ce serait une idée, ça, de retourner là-bas ! Labiba me manquait…

« Carlisle… ? » Murmurai-je pour attirer son attention, observant son regard fixe dans le vide. « Quand tu auras un peu de temps libre… Tu crois qu’on pourras repartir en Afrique ? Voir Labiba et les autres au village. Et puis, Tasha n’y est pas allée depuis… Depuis qu’elle était bébé, je ne sais pas si elle se souvient de tout ce qu’il s’y passait mais ça serait pas mal, non ? »

J’agitai les doigts devant moi en parlant, sentant ses mains glisser sur mon ventre lentement.

« Je devrais pouvoir m’arranger pour prendre une période de latence après quelques dates… Ou justifier d’en faire au Nigeria ou dans les pays alentours ? Et puis ça me permettrait de retrouver Mbobo ou encore DJ Kay et… Et de… Proposer quelques choses pour enregistrer des… Carlisle… ! »

Ses mains étaient descendues plus bas encore. Bien plus bas pour un massage. Bien trop bas pour que je reste concentré sur le fil de ma pensée et il en profitait, le bougre ! Je sentis son « hm » innocent même si je savais qu’il n’avait absolument rien d’inconscient dans ses gestes. Me redressant légèrement, je ne fis qu’accentuer la pression de ses doigts sur moi et je fus parcouru d’un délicieux frisson brûlant toute mon échine. Quel petit… !

« J’étais sérieux ! »

Mais apparemment lui aussi, il me le confirma d’un simple geste qui me fit hoqueter, le rouge me montant immédiatement aux joues quand je tremblai des pieds à la tête de la délicieuse sensation qui m’envahie tout entier. J’avais le choix : continuer de lutter ou bien abdiquer. Mais il était plutôt rare qu’il prenne de lui-même l’initiative alors je n’avais pas grand intérêt à me montrer réticent. Déjà parce que je ne l’étais pas. Ensuite parce que… Parce que ! Qui lui résisterait, sérieusement ?

J’eu envie de l’embrasser et il m’accorda au moins ça, ma main venant caresser sa joue sans pouvoir en avoir davantage. Me voilà coincé dans la baignoire, dos à lui, à la merci de ses envies et pulsions quelle qu’elles soient… !

Ca va, y avait largement pire comme plan.
Je risquais pas de me plaindre.

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________________________________________ 2018-10-10, 17:46

Mama is back } Antropy & Carlisle - Page 2 1520695137-eviltiger-13Mama is back } Antropy & Carlisle - Page 2 D65fdf99c4158b94546d01fc4ada3be7
Please, stay.

Carlisle n'était pas exactement ce que l'on nommait un homme de luxure. Au contraire. Il avait passé une bonne partie de sa vie éloigné de tout ces plaisirs impures et grotesques, fait uniquement de pulsions animales tout juste bonnes à manipuler les faibles de corps et d'esprits. Plus qu'éloigné, il en était révulsé. La simple pensée d'une main de femme -à l'époque, impossible de songer à la moindre autre option- glissant sous sa chemise le couvrait d'un frisson de dégoût et le faisait rire, son mécanisme de défense. Combien de jeunes femmes avait-il ainsi humilié, sans vergogne aucune? Combien ces manières avaient-elles forgés cette réputation d'homme incorruptible qui, un temps, lui avait permit de devancer le moindre de ses concurrents? Combien de fois avait-il prier le ciel pour que l'une de ses soeurs se marie et porte des enfants pour faire perdurer le nom, pour que lui n'ai jamais à s'abaisser à agir de pareille manière? Si on lui avait prédit qu'un jour, tout cela serait son lot et qu'il l'accepterait avec fierté, il n'y aurait pas cru un seul mot.

Cela n'avait pas été simple et il arrivait à Carlisle de remercier le ciel de cet entêtement dont pouvait faire preuve Antropy dans tous les aspects de sa vie. Sans lui, sans cette manière obsédante de tourner autour de lui pour le rendre fou d'amour de ce rouquin aux doigts et à l'oreille d'or, jamais il n'aurait eue la force d'accepter un enfant dans sa vie. Cela lui valait bien des tracas, allant des simples 'disputes' père-fille aux véritables ulcères qu'il devait soigner deux fois par an, mais aussi surprenant que cela lui paraissait toujours, il les acceptait sans remords ni regrets. Sa famille était la plus belle chose qu'il ai jamais eue, quand bien même celle-ci était née dans la douleur. Il n'avait jamais reparler vraiment à Antropy de cette fameuse nuit, de ce choix qu'il avait fait et qui avait tout déterminé, pour lui comme pour eux. Trop douloureux, pour lui comme pour Antropy sans doute. Pourtant, quand leur étreinte eue fait clapoter l'eau suffisamment pour en renverser sur le sol carrelé, et qu'il eue du étouffer les gémissements du rouquin en posant sa main sur ses lèvres, embrassant son cou à de multiples reprises pour percevoir les battements irrégulier de son pouls, quand le calme alangui reprit ses droits sur eux, Carlisle se pencha à son oreille.

-Je n'ai aucun regret, murmura-t-il. Berlin, dut-il préciser, face au froncement de sourcil du roux.

Cela lui valut une oeillade surprise, suivit d’un silence songeur.

-Quand j’ai du choisir entre… Te laisser ou vous prendre tous les deux dans ma vie, j’ai… Eue peur. Parce que dans les deux cas, cela allait me détruire, et je n’avais aucune idée de si j’y survivrais vraiment.

Un autre silence, un peu plus long cette fois, s’installa entre eux, pendant que l’eau autour d’eux continuait de monter lentement.

-Mais je crois, murmura-t-il en enfouissant son nez contre ses cheveux, que c’est la meilleure décision que j’ai su prendre de toute ma vie.

A nouveau, il resserra ses bras autour de lui, l’enlaçant simplement jusqu’à ce qu’Antropy ne vienne chercher ses lèvres, l’embrassant tendrement d’abord, un peu plus passionnément par la suite.

-Nous retournerons au Nigéria, Labibah me manque également. J’organiserais cela dès demain matin, et nous partirons pendant les vacances scolaires de Tasha.

Bien qu’ayant les moyens de lui suivre des cours à domicile, Carlisle avait totalement refusé que Tasha puisse à sa guise quitter l’école pour les caprices de ses parents. C’était un comportement vulgaire que Carlisle réprouvait et il tenait à ces principes. Malgré toute l’influence dont Antropy était capable, il en demeurait certain que Carlisle refusait de lui céder. Il y eue un autre silence, simple, doux, pendant lequel Antropy se prit à jouer à bouger ses pieds contre les siens, faisant tourbillonner l’eau autour d’eux, que Carlisle finit par éteindre quand elle atteignit leur flanc respectif, toujours lover l’un contre l’autre. Cela avait quelque chose de follement rassurant et de tendre, une étreinte comme ils n’en avaient plus partager depuis longtemps et même si son origine n’avait rien d’amusant, Carlisle devait avouer que pour une fois, il avait vraiment eue une riche idée. Un instant, il caressa les tempes rousses d’Antropy, se demandant quels cauchemars renfermait donc cette tête si pleine de beauté. Il craignait -et savait- qu’il était probablement leur source et en ressentit une réelle tristesse, venant embrasser sa joue un instant.

-Antropy ? Parle moi de ta famille. Je n’ai certes pas eue les meilleurs exemples à suivre et je me calque beaucoup sur ta vision de ce qu’elle doit être, mais j’ignore comment ils sont.

En réalité, il possédait un dossier complet sur chacun des membres de la famille Tiger, allant des arrières-arrières grands-parents à la dernière nièce née. Mais les mots couchés sur le papier ne donnait en rien la substance même des caractères, ni des façons d’être, bien qu’il se soit fait une idée générale et globale et qu’il soit, au demeurant, assez bon juge du genre humain.

-Je sais que tu as de multiples sœurs. Tasha leur ressemble-t-elle?

C’était toujours délicat, de parler de la filiation de Tasha. Carlisle s’était forcé à faire des recherches approfondies sur la mère de Tasha et sa famille, afin de s’assurer qu’aucune maladie génétique ne la guette, mais il n’avait rien trouvé de très concluant. Fille unique, mère décédé d’un cancer, père purgeant une peine de prison de vingt trois ans. Une famille d’ouvrier, de basses extractions, et une fille qui avait rêvé de devenir une femme de chanteur. Au fond de lui, Carlisle savait qu’il aurait du compatir. Mais encore aujourd’hui, il était incapable de le faire. Il remerciait cette femme d’avoir mit au monde une fillette aussi magnifique et merveilleuse, mais sa gratitude s’arrêtait là. Il n’irait jamais fleurir sa tombe, bien qu’il ai veillé à la faire entretenir. Juste au cas où un jour, Tasha demanderait qui était sa mère. Cela arriverait un jour, qu’il le désire ou non. Il espérait juste que ce jour là, Antropy serait présent. Carlisle ne se sentait pas encore prêt à louer les grâces de cette femme à qui il devait pourtant beaucoup.
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________________________________________ 2018-10-17, 11:36


Mama knows Best


J’étais encore baigné de la tranquillité latente provoquée par cet afflux d’hormones dans tout mon corps et je me laissai porter par sa voix. Par ses aveux qu’il ne réservait qu’a de tels moment, ses mains caressantes sur moi et son ton grave résonnant jusque dans mon échine. Il avait un don certain pour prendre soin de moi et c’était alors comme si les cauchemars s’étaient enfuis, cachés, drapés dans des songes plus doux et des rêves tranquilles. J’avais le cœur qui battait lentement, les muscles détendus et l’esprit un peu plus en paix pour au moins quelques heures… Bougeant tranquillement dans l’eau chaude, à l’abri de son torse et de ses bras, je fis mine de réfléchir à sa question avec tout le sérieux dont j’étais capable.

C’est à dire, pas beaucoup.

« Trois sœurs. Tu connais Alice déjà, elle vit pas très loin. C’est la plus jeune des trois mais aussi la plus gentille, elle se fait un peu malmener au travail je crois mais elle refuse qu’on l’aide… C’est toujours elle qui parle en dernier à la maison mais elle écoute tout. »

C’était un de ses nombreux talents, outre la discrétion et sa capacité patentée à devenir invisible aux yeux des autres. Alice manquait de confiance en elle et je trouvais que ceux qui se prétendaient ses amis en profitaient bien trop… Mais j’étais sans doute aussi naïf qu’elle – quoique, le temps pouvait changer bien des choses parfois – et elle avait toujours été là pour moi quand il le fallait. Les gens croyaient souvent, à tort, qu’elle était ma petite sœur ; en même temps elle donnait l’impression d’avoir à peine la vingtaine ! Chanceuse.

« Ensuite il y a les jumelles. Enfin c’est pas des vraies jumelles mais ça reste quand même juste, non ? Alexis travaille à Londres. Je suis sûr qu’elle fait parti du MI6 mais elle me dit qu’elle est juste flic… Je découvrirai son secret un jour ! » Je pris un air résolu à cette idée. « Elle rentre pas souvent, uniquement pour les gros évènements familiaux. Peut-être qu’elle sera là à Noël cette année ? Ca serait bien. Ca fait longtemps que je l’ai pas vu… »

Alexis était le garçon manqué des filles, d’après maman, et elle le rendait bien. Véritable pile électrique et bourrasque de franchise, elle avait un caractère bien trempé qui nous avait valu des ennuis à l’école… Mais aussi de sacrés souvenirs ! Elle n’hésitais jamais à se mesurer à ceux qui nous critiquaient et elle a été collée de nombreuses fois pour bagarres dans la cours. Qu’importe, ça lui plaisait et elle disait toujours que quand elle serait grande, elle ferait régner la loi le plus justement possible ! Comme quoi, faut s’accrocher à ses rêves.

« Adele est plus mesurée et bien plus distinguée ! Elle, ça a toujours été un peu la pimbêche mais les ados l’adoraient au lycée. Elle mettait tout le monde à ses pieds et elle en profitait, très clairement… Pendant presque quatre mois elle a refusé de nous parler pour pas que son groupe d’amis soit au courant qu’on était de la même famille ; elle s’était même décolorée en blonde ! Heureusement Alexis lui a fait entendre raison – à force de marteler nos liens – et elle est vite redevenue un peu plus gentille. Enfin, ça dépend pour qui. Elle travaille pour le FISC, ça rend pas les gens très aimables mais il paraît qu’ils se font souvent berner quand ils la voit. En tout cas, elle travaille super bien, Adele a toujours été très sérieuse ! Moi elle me faisait un peu peur même avant… »

Je me renfrognai rien qu’à ces souvenirs mais j’esquissai rapidement un autre sourire, mes doigts s’amusant à s’entrelacer avec ceux de mon mari. Je n’avais jamais été aussi proche d’elle que des autres, mais je me souvenais avoir partagé quelques soirées en tête à tête qui avaient été aussi importantes qu’épiques. C’était souvent elle qui devait me garder quand les parents s’absentaient alors forcément, on avait fini par prendre nos petites habitudes : soirée télé et pizza, en l’occurrence ! Je savais qu’elle se donnait de grands airs mais qu’au fond, elle n’était pas si méchante. Juste… Différente. Mais son petit sourire quand on parvenait à se comprendre valait tout l’or du monde !

Bon, mes oreilles se rappelaient aussi de ses tirages express et de sa capacité à me retrouver n’importe où. A croire qu’elle avait planqué un radar sur mes habits à l’époque !

« Et puis bah, Agnes, ma grande sœur ! » Rien que de dire son nom, j’en avais le sourire jusqu’aux oreilles et un rire au fond de la gorge. « T’as déjà du la croiser je crois… Elle est commissaire priseur et voyage beaucoup dans l’est des Etats-Unis et à Londres pour les ventes de sa compagnie ! Je suis sûr que vous vous entendriez bien, vous avez les mêmes passions pour l’art et presque les mêmes goûts. »

Je lui lançai un regard en coin.

« Pour elle aussi, son préféré, c’est moi ! »

J’eu un soupir amusé en embrassant le nez de Carlisle, gloussant quand il poussa un léger grognement faussement mécontent. Me tournant pour lui faire un peu mieux face, je m’appuyai contre son torse et relevai le menton afin de le fixer. Les pieds en l’air et les jambes pliées, j’avais surtout l’air idiot. Mais c’était son idée, le bain !

« Même si je sais que tu les as sans doute déjà étudiées avant qu’on en parle, ça serait sympa que tu les rencontre toutes officiellement, tu en dis quoi ? » Une idée était en train de germer dans mon esprit en même temps que ces paroles sortaient de ma bouche. « En général on se réuni pour Noël ! L’an dernier on est allé au chalet avec tes sœurs – et tes prétendants – pourquoi on irait pas dans ma famille cette année ? Ils habitent un peu plus au nord mais c’est pas si loin que ça. C’est plus près que l’Angleterre en tout cas ! Et puis on pourrait inviter Emily, même si elle est ronchon je sais que mes sœurs l’aiment beaucoup… Et ça ferait faire un arrêt cardiaque à mon père ! »

Le secret n’en était plus vraiment un dans la famille : mon père avait eu une fille illégitime après nous, avec une autre femme que ma mère, et cette fille c’était Emily ! J’avais donc une petite soeur et les filles… Aussi. Je l’avais d’abord avoué à Alice, qui l’avait dit aux jumelles puis à Agnès. Et enfin, notre mère. Elle nous avait surpris en nous annonçant qu’elle était déjà au courant et j’avais d’abord mal compris pourquoi elle restait quand même avec notre père. Il existait des choses incompréhensibles comme le Pardon ou la Culpabilité, mais avant de rencontrer Carlisle je ne pouvais pas les comprendre. Avec lui… c’était différent. Tout était différent. Bien trop différent pour revenir en arrière mais, en même temps, qui voudrait remonter le temps ?

Même si nous avions eu quelques petits soucis de rouages, nous n’en serions pas là sans tout ça.

Je caressai ses cheveux pour les mettre en arrière, comme j’aimais. On pouvait apercevoir ses racines rousses sous la blondeurs et je m’en amusai, frissonnant quand ses mains accompagnèrent mes hanches pour éviter que je ne perde de trop l’équilibre.

« Tasha leur ressemble et, en même temps, elle est tellement différente… » Répondis-je enfin à sa question. « Elle a les yeux pétillants de la famille et la capacité de réponse de mes sœurs… Mais elle te ressemble avant tout et c’est quelque chose que j’aime encore plus chez elle. Des fois quand je l’entends parler, j’ai l’impression de te voir (en fille) et ça me fait comprendre à quel point tu es son modèle. » Je marquai une pause. « Et son père. Sans toi, sans ta décision à Berlin, je ne sais pas ce qu’on serait devenus. »

Mais nous ne serions pas ici. Ni ensemble. Ni… Peut-être même en vie.

« Carlisle… » Murmurai-je en embrassant sa mâchoire.

J’avais laissé un long silence avant ma supplique et il semblait avoir compris. Je pris quand même d’autres minutes dans le bain qui commençait à refroidir avant de m’extirper de là, m’enveloppant dans une large serviette en le voyant faire de même. Comment un type arrivait à être aussi sérieux et aussi beau à la fois, bon sang ? Il ne manquait qu’un ou deux tatouages pour le rendre absolument sexy mais je n’avais toujours pas réussi à le convaincre… Qu’importe. Ebouriffant mes cheveux pour les sécher sommairement, je fini par le fixer sans pour autant avoir renfilé mon pyjama.

Tendant la main vers la serviette qu’il avait pudiquement nouée autour de sa taille, je le tirai vers moi pour retrouver le contact doux de sa peau à peine sèche. J’adorais sa chaleur. Sa hauteur. Ses muscles dessinés et entretenus avec une activité physique régulière. Et en parlant d’activité physique… J’en aurais bien fait une qui ne nécessitait aucun vêtement mais sacrifierai le peu de sommeil que nous pouvions nous accorder.

Tant pis, il y avait des priorités dans la vie.

- FIN -
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________________________________________ 2018-10-20, 23:13

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Please, stay.

Les heures les plus sombres comportaient toujours des instants de lumières, des instants où l’espoir même le plus fou prenait place et devenait, l’espace d’un court temps, une potentielle réalité. Carlisle ne les connaissait que trop bien, ces instants filaments qu’il avait apprit à ne plus suivre, plus croire, pour ne jamais dévier de son intention première. Les choses avaient quelque peu changés, depuis qu’Antropy était entré dans sa vie et ces instants d’espoir s’étaient complexifiés car prenant souvent le pas sur sa réalité si sensiblement calibrée. Antropy était un bulldozer, une tornade venu pour bousculer la moindre de ses habitudes et le moindre de ses réflexes, le moindre de ses instincts. Il aurait presque pu, en cet instant critique, le faire oublier à quel point la situation était gravissime et ce qui les avaient poussé à se retrancher dans leur appartement plutôt que de profiter pleinement de leur après-midi familiale sur le domaine de sa famille.

Mère. A la simple pensée de son existence, sa main caressant les épaules d’Antropy se fit plus raide, plus saccadée, s’arrêtant presque un instant avant de reprendre, dans un rythme mesuré. Il s’était endormi depuis quelques minutes déjà, mais Carlisle n’était pas parvenu à bouger de là, simplement… Bien. Il était rare qu’il se sente ainsi alors en cet instant, il souhaitait en profiter pleinement, à la juste mesure de son importance. En cet instant précis, Antropy et Tasha étaient en sécurité, avec lui, dans un endroit où ils ne risquaient rien. C’était assez rare pour qu’il le vive dans son entièreté. Sans s’en rendre compte, il serra légèrement l’épaule d’Antropy, dans un geste protecteur, inhalant l’odeur de sa tignasse rousse emmêlés des multiples ébats de leur nuit, qui avait enfin eue raison de sa résistance et l’avait plonger à pieds joints dans les affres du sommeil et du repos.

Carlisle, en revanche, n’en était pas encore là. Une pensée le chiffonnait encore, l’empêchant de fermer les yeux, d’enfin se laisser aller, le temps de quelques heures. Sans bouger, continuant de caresser sa peau, il finit par soupir, abdiquant en tendant la main vers sa table de chevet pour extraire de son tiroir une tablette noire, à la protection de cuir foncé. D’un geste, il la déverrouilla, abaissant la luminosité pour ne pas réveiller Antropy, qui eue un soupir plus brusque que les autres, vite oublié par d’autres caresses. En quelques gestes, Carlisle eue tôt fait de contacter ses meilleurs hackeurs et ses meilleurs agents, leur envoyant à tous une mission simple : surveiller Mère.

Comptes bancaires, légal ou non, habitudes, nouveautés, tout, absolument tout devait lui être transmit dans la minute. Il fallait qu’il sache avec qui elle dînait, et ce dont ils avaient parler. Il fallait qu’il sache avec quelles connaissances elle avait renouer, et dans quels buts. Il fallait qu’il sache ce qu’elle monnayait et pourquoi. Il devait absolument tout savoir de ce monstre, et dans le moindre détail. Surtout, il devait savoir ce qu’elle complotait contre lui, contre Antropy, et contre Tasha. La présence d’Indiana au Manoir ne lui disait rien qui vaille, celle de Claymore encore moins. Quel plan immonde fomentait-elle déjà en secret ? Et à quel point Indiana pensait-elle qu’elle ai raison à son sujet pour accepter de la voir ? Rien que d’y songer, Carlisle devait bien avouer qu’un sentiment amer lui envahissait le coeur. Il avait toujours été présent pour elle, toujours. Envers et contre tout, même contre son propre instinct, en ce qui concernait son mari, alors pourquoi ? Pourquoi ne pouvait-elle pas en faire de même ? Et en même temps, il savait très bien pourquoi. Aurait-il réagit autrement si il avait été à sa place ?

Il eue un soupir, las. Il était vrai qu’il n’avait plus rien à voir avec celui qu’il avait été jadis. Il faisait même honte à cet autre qu’il avait été, rien que d’y songer. Un homosexuel, dépravé et sentimental, être de luxure, le père d’une fille qu’il n’avait pas eue, le père d’une enfant née d’un autre sang, une enfant née d’une trahison et.. Un père aimant. Un mari aimant. Un chef amer mais comprenant enfin la véritable valeur de la vie. Un pharmacien plus engagé, un scientifique plus humain. Un homme capable de pardon et de tendresse, un homme pourvu d’un coeur plus apte à ressentir les entrelas des sentiments. Un homme meilleur, dans le meilleur des possibles.

Doucement, il baissa les yeux, observant le visage d’Antropy dans son sommeil. Même endormit, il gardait un éternel demi-sourire à la commissure des lèvres, comme un rire lancé au destin. Avait-il jamais songé que celui-ci le lierait à lui, l’opposé exact de tout ce qu’il avait sans doute pensé aimer un jour ? Lui n’y aurait jamais pensé mais… Antropy avait une vision du destin bien plus posée que celle que Carlisle avait eue l’habitude de lire dans les opéras et dans les œuvres littéraires du XVIIIème siècle. Amusé, il eue un sourire, continuant de caresser son dos quand il le vit entrouvrir les yeux, battant trop des paupières pour être réellement éveillé.

-Tu dors pas? marmonna-t-il, cependant que Carlisle reposait la tablette sur sa table de chevet.

-Dans un instant. Rendors toi, acquiesça-t-il, sur le même ton, caressant les mèches de son front.

Le roux eue un hochement de tête, quelque chose de vague, avant de grogner, se peletonnant un peu plus contre lui, cependant que Carlisle remontait la couverture sur ses épaules. Sur le bois sombre, des reflets bleutés affichaient les multiples réponses déjà présentées par ses espions, les réponses à ses offres, les accords à passer, les tarifs aussi sans doute. D’un geste, Carlisle les coupa, replongeant le rectangle dans l’obscurité du tiroir, se renfonçant dans les couvertures épaisses. Les monstres et le destin pouvaient bien attendre une nuit de plus.

Lui avait attendu une nuit entière pour rencontrer le sien.
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