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 Paris holds the key to your heart - Dim&Anya

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Anastasia Romanov
« Men are such babies »

Anastasia Romanov

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________________________________________ 2017-08-10, 00:58 « Men are such babies »

Anastasia leva les yeux au ciel, faussement blasée. Dimitri ne portait pas Gringoire dans son cœur, c'était certain, et ne se priva jamais de remarques bien senties à son encontre. Il fallait cependant reconnaître, qu'il n'avait peut-être pas tout à fait tort. Le poète avait sans doute autant de qualités que n'importe quel homme, mais il n'avait certainement pas été doté de celle de discrétion.
- On peut toujours le prévenir le jour même ou lui donner rendez-vous au lieu dit sans lui dire pourquoi, affirma Anastasia en plantant ses yeux clairs dans ceux de Dimitri tandis qu'il entrelaçait ses doigts chauds contre ses mains sempiternellement froides, à elle.
Anya aimait ce contact simple qui avait quelque chose de rassurant et presque intime tout en restant finalement très sobre. Son sourire s'agrandit. Elle était heureuse qu'il accepte l'idée, fière d'avoir visé juste et heureuse d'éviter une dispute inutile, si bien qu'elle oublia, l'espace d'un instant, le monde qui les entourait. Leur regard était rivé l'un à l'autre et rien, pas même l'endroit solennel, ne semblait compter.

***

Anastasia ne fut pas mécontente de retrouver la chaleur de l'hôtel et vit sur les traits de Dimitri qu'il n'en pensait pas moins. Plusieurs fois dans l'après-midi, elle avait soufflé sur ses doigts pour les réchauffer avant qu'ils ne les prennent dans ses plus grandes mains. Mais en dépit du froid, Paris restait Paris, la ville des amoureux, la capitale de la culture française, leur ville, en quelque sorte, celle qui avait scellé leur destin et continuait sur cette voie.
Jusqu'à ce que leurs pieds n'en peuvent plus.
Les bonnes manières vieillottes de Dimitri avaient parfois le don d'agacer Anastasia mais avaient aussi leurs bon côtés. Avoir le privilège de se doucher la première parce qu'on était une femme n'était, par exemple, pas négligeable.
Anastasia se délassa de longues minutes sous le jet bouillon, sentant le sang battre dans ses extrémités. Une fois réchauffée - et lavée, tant qu'à faire - la jeune femme coupa l'eau, s'enveloppa dans un peignoir moelleux et rejoignit la chambre, s'étonnant de trouver Dimitri au téléphone.
Puis son visage s'illumina quand il lui tendit l'appareil pour qu'elle entende, à son tour, la voix de leur bébé.
Anya n'était pas une personne spécialement expansive. Elle pouvait éprouver des sentiments très forts mais ne leur laissait que rarement l'occasion de s'exprimer franchement. La plupart du temps, la jeune femme se contentait d'allusion qu'une oreille avertie saurait comprendre ou d'une attention qu'un œil aguerri pourrait percevoir. Mais ces choses ne s'appliquaient pas à Abigaëlle.
Aussitôt qu'elle eut le téléphone contre son oreille, son visage s'éclaira, son sourire s'agrandit et sa voix monta dans les aigus alors qu'elle parlait à son petit trésor. Elle avait à peine prêter attention au départ de Dimitri pour la salle de bains, sentant pourtant pleinement le baiser dans sa nuque, et s'était laissée tomber sur le lit, trop heureuse d'entendre son bébé.
Anya aurait pu lui parler des heures durant et répéter ses mots d'amour et ses promesses cent fois sans jamais se lasser. Au bout d'un moment, elle s'était levée pour arpenter la pièce, sans trop savoir où se mettre. Elle resta au téléphone tout le temps que dura la douche de Dimitri mais dût se résoudre à raccrocher. Ils étaient à Paris pour profiter l'un de l'autre, se retrouver, retrouver leur vie d'amoureux, non pas pour jouer les parents à distance, même s'ils le restaient. Et pourtant, Anya avait l'impression de réaliser seulement à quel point leur fille était encore petite et fragile et semblait découvrir pour la première fois l'adorabilité de sa voix à laquelle il était difficile de ne pas céder.
- Plutôt deux fois qu'une. Mais elle est tellement adorable et on est tellement loin. On peut au moins lui ramener une peluche, non ? fit-elle avec de grands yeux avant qu'il ne sente l'angoisse qui persistait chez elle.
Tout irait bien, il n'y avait aucune raison qu'il en soit autrement. Un enfant ne pouvait pas, statistiquement, se faire enlever deux fois en trente jours. N'est-ce pas ?
Pour se changer les idées, Anastasia embrassa Dimitri à pleine bouche, ce qui était autrement plus délicieux que des angoisses parentales. Elle frissonna au contact de sa main sur son bras puis ses hanches. L'atmosphère parisienne, peut-être... Ou autre chose ? Sans doute autre chose, une ardeur qui était revenue peu à peu et qui flamboyait à présent dans cette chambre française, près de ce lit immaculé qui ne le resta pas longtemps.
Anya et Dimitri se perdirent dans un corps à corps passionné où, à nouveau, le reste du monde avait cessé d'être. Ce n'était plus que lui et elle, elle et lui. Son souffle et ses baisers qui brûlaient sa peau. Leurs corps nus entrelacés pour ne faire plus qu'un dans une communion des sens (oui, j'ai écrit, oui, c'est cliché mais ça me faisait marrer parce qu'à 00h43 voilà) qui prit fin presque trop rapidement.
Le souffle court, Anya cala sa tête contre le torse de Dimitri. Ils restèrent ainsi quelques instants, le temps que le reste du monde ne leur revienne à l'esprit.
- Et donc ? Tu veux faire quoi ce soir ? C'est le premier soir à Paris, il faut pas qu'on se loupe là-dessus. Tu crois qu'on tente le bateau-mouches ? J'ai peur que mes orteils n'y survivent pas. Ou alors on se rhabille pas et on reste ici toute la soirée mais j'ai peur de mourir de faim à un moment. Ca creuse tout ça, mine de rien.

***

Il fut convenu que se sustenter était somme toute une bonne idée, ce qui impliquait de se rhabiller bon gré mal gré. Anastasia troqua ses vêtements du jour, qui avaient essuyé de longues heures de vol et de marche, pour quelque chose de plus séduisant mais néanmoins couvrant.
Ils descendirent les étages qui les séparaient de la réception de l'hôtel tels ces gens qui ont le temps, une espèce qui se faisait rare dans Paris.
- Il va aussi falloir régler cette question de peluche, reprit Anastasia pour ne pas laisser le silence s'installer. Hors de question de ramener un truc moche, et pas non plus une tour Eiffel en mousse. Je suis sûre qu'ils en font. Tu voudras ramener quelque chose à ta mère ? On a pas tant de connaissances que ça, on a sans doute de quoi avoir un budget souvenir.
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________________________________________ 2017-08-17, 22:35




Once upon a December

Se rhabiller avait été plus obligatoire que réellement désiré, nos estomacs criant une famine engourdie par le froid mais éveillée par la chaleur de l’autre. Plutôt que de nous éloigner de trop, le vol et la journée ayant eu raison de mes insomnies, nous avions décidé de nous rendre au petit restaurant de l’hôtel. Simple, classique. De quoi éviter les pieds gelés en la neige qui tombait encore à gros flocons à l’extérieur… Cela semblait surprendre le réceptionniste qui en discutait justement avec un de ses collègues. Apparemment, il neigeait rarement aussi longtemps sur Paris. J’haussai un sourcil dubitatif, reportant mon attention sur Anastasia lorsqu’elle me parla de… peluche ? Pourquoi est-ce que… Ah oui. Abigaelle voulait une peluche de Paris. N’avait-elle pas plus simple demande ? A dire vrai, c’était sa première vraie requête puisque nous ne partions jamais très loin sans elle ; encore moins depuis qu’elle avait été kidnappée. Elle faisait parfois quelques demandes et autres caprices qui ne duraient jamais bien longtemps, mais une réclame à ce point solennelle, nous n’y étions pas habitués.

« On lui trouvera une peluche. » Acquiesçai-je, avant d’ajouter devant son air surpris : « A Abigaelle. »

Pas à ma mère, n’exagérons rien. Et puis que ferait-elle d’une chose pareille ? De ce que je connaissais d’elle, elle ne s’embarrassait pas vraiment de choses futiles… Même si mes souvenirs s’accrochaient aux tentures qu’elle aimait étendre sur les murs pour rendre l’intérieur plus chaleureux, et à ses innombrables porcelaines qui étaient restées derrière elle en Russie. Au final, elle n’avait pas amené grand chose de sa vie précédente ; le départ avait rude et rapide, pas de quoi passer des heures à trier les affaires. Je la soupçonnais de s’être raccrochée à quelques rares portraits officiels de notre famille mais je ne lui avais pas demandé. Je ne lui demandais pas grand chose tandis que ses questions tournaient principalement autour du mariage. Mariage sans date, pour le moment.

Je fis mine de réfléchir en montrant les clefs de notre chambre au serveur. Celui-ci nous souffla quelque chose en français avant de se reprendre en anglais, puis de nous installer dans un coin tranquille de la pièce. L’heure était un peu avancée et il n’y avait pas autant de monde qu’imaginé. Tant mieux, nous serions plus tranquilles. Il parti après avoir déposé les cartes sur la table et je mis un peu de temps avant de regarder la mienne, plongé dans mes réflexions quant à un possible cadeau. Je n’avais pas pour coutume de « ramener » des objets pour les autres. La plupart du temps, j’offrais quand je voyais quelque chose qui pouvait leur correspondre – exception faite de noël désormais et de l’anniversaire de certaines personnes. Sinon, je n’aimais pas offrir pour offrir, je préférais que l’objet en vaille la peine.

C’était donc d’autant plus compliqué de trouver quelque chose sans l’avoir sous les yeux à cet instant précis.

« Si nous trouvons quelque chose, on lui prendra. »

Je la laissais énumérer les personnes qui seraient concernées par un souvenir, hochant ou secouant la tête en fonction de ses propositions. Je n’avais pas très faim finalement, mais je consentis à goûter à ce que les français appelaient ratatouille, accompagnée d’un verre de vin. Un bordeaux, j’avais toujours eu envie d’en boire un dans la capitale et c’était désormais chose faite. Nous attendîmes, plusieurs longues minutes, mais aucun de nous deux ne sembla s’en insurger. J’appréciai le calme qui régnait dans le petit restaurant, des conversations diffuses mais pourtant tamisées, une ambiance doucereuse et une nuit noir d’encre à travers les fenêtres qui donnaient sur l’extérieur. Quelques réverbères se devinaient, éclairant des passants pressés ou surplombant des voitures prudentes. C’était agréable.

Je tendis mon verre pour le faire tinter au sien lorsqu’ils arrivèrent, humant l’odeur savoureuse du plat qu’on venait de me déposer devant le nez. Un court instant, ma gorge se serra en me rappelant des mets d’Aloysius Black et de sa capacité extraordinaire à sublimer les aliments… Je chassais rapidement ces sombres pensées, papillonnant du regard pour me concentrer sur la jeune femme qui me faisait face depuis le début de cette soirée.

« S’il fait beau, pourquoi pas. » Acceptai-je, pour les bateaux mouches. En espérant que ceux-ci continuent de voguer sur la Seine même en plein mois de janvier. « Après-demain, nous sortons un peu de la ville. »

Je l’entendais déjà faire des plans aussi lui indiquai-je ce détail pour qu’elle le prenne en compte dans ses priorités. Je n’avais pas vraiment planifié notre voyage, je préférais largement que nous l’organisions à deux ; il y avait cependant une visite qui avait nécessité de réserver des billets à l’avance et nous ne pouvions plus changer de date. Au moins, s’il pleuvait nous serions à l’abri. Sinon, nous profiterions des jardins extérieurs en plus de l’intérieur.

Je fis mine de ne pas avoir entendu sa question pour en savoir plus, me concentrant sur les bouts de courgettes et de tomates que ma fourchette venait de piquer. Anastasia avait l’habitude de ne pas tout savoir de moi, même si j’appréciais sa curiosité parfois. Ce genre de moments. Ce genre d’instants, voilà tout.

La suite du dîner fut aussi tranquille que le commencement. Nous prîmes un dessert à partager mais je lui laissais la gourmandise, avant qu’elle ne m’avoue ne plus avoir faim. Fort bien, l’assiette fut néanmoins terminée et une fois la note réglée – ils n’avaient pas l’air d’être habitué à nos pourboires américains ici… - nous remontâmes dans la chambre. Il n’était pas dix heures passées pourtant je sentais le poids de la fatigue s’abattre lourdement sur mes épaules. La journée avait été longue. Très longue. Intéressante et enrichissante ceci dit.

Je passai mes paumes sur mon visage après y avoir aspergé de l’eau, m’observant un court instant dans le miroir avant de détourner les yeux. Je ne supportais toujours pas mon reflet et l’évitais le plus possible. Changé dans une tenue plus agréable au sommeil, je rejoignis Anya et m’allongeai de tout mon long avant de fermer les yeux. Un soupir. Quelques instants d’immobilité pure. Enfin un peu de repos bien mérité !


* * *


« C’est par-là. »

J’indiquai de la main une direction, attendant qu’elle me rejoigne pour traverser le passage piéton. Mes souvenirs étaient extrêmement flous et mélangés, pourtant il me semblait reconnaître la route. Nous nous approchions de l’Opéra Garnier et ensuite, il faudrait encore marcher. Etrangement, la route m’avait parue encore plus floue en essayant de la faire en transport, nous avions donc opté pour la marche – en plus, il ne neigeait pas aujourd’hui et nous pouvions donc profiter des extérieurs avec un peu plus de luminosité. D’autres gens, touristes comme habitants, avaient du se faire la même réflexion car les rues étaient bien plus remplies que la veille.

Il était encore suffisamment tôt pour que les boulangeries émettent de délicieuses odeurs de viennoiseries et nous venions de craquer sur deux pains fourrés au chocolat pour tenir le reste de la matinée. Encore chauds. Un café noir pour accompagner tenait dans ma main gauche, aussi amer que possible pour réveiller une peu plus mon esprit embrumé.

« Il me semble que c’est à gauche après l’opéra... » Commentai-je. « Quoique, c’était un labyrinthe à l’époque. »

Et pas qu’un petit. Même si nous avions l’avantage de ne pas pouvoir croiser Raspoutine cette fois-ci, un seul épisode suffisait amplement. En tout cas, cela ne nous avait pas retiré l’envie de voir à nouveau, en briques et en pierres, ces bâtiments qui avaient été témoins de notre dernière escapade sauvage. Restaient juste à ne pas se perdre comme à l’époque… Se serait dommage de manquer le reste de notre séjour parisien.

« Le quai était bien plus loin dans mon souvenir... »

Précisai-je quand nous contournâmes l'Opéra pour nous lancer en direction du fleuve. Avions nous donc autant marché sous le joug du sorcier ? Avais-je autant couru pour venir lui porter secours ? il fallait croire. Car au loin se dessinaient les chevaux ailés des rambardes qui surplombaient la Seine, vestiges d'anciens moments dont nous nous serions sans doute bien passés. Au moins, c'est que nous étions dans la bonne direction pour trouver les bateaux-mouches.



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________________________________________ 2017-08-18, 01:20 « Men are such babies »

Passée la légère surprise, Anastasia sourit à l'idée d'offrir une peluche à celle qui avait jadis été sa nounou et était, de fait, plus habituée aux jouets cassés qu'aux neufs. L'idée aurait sans doute était bonne si Anya était encore une petite fille. Mais elle n'en était plus une depuis fort longtemps, tout comme Kseniya n'était vraisemblablement plus une nounou. Un parfum, peut-être, ou quelque chose de local ferait amplement l'affaire pour la mère de Dimitri qui pourrait tout aussi bien se creuser les méninges le moment venu. Après tout, c'était sa mère à lui.
Tandis que son esprit parvenait à cette conclusion, le regard bleu d'Anastasia se posa sur la salle du petit restaurant de l'hôtel, puis sur le serveur qui les conduisit vers une table isolée, ce qu'Anastasia apprécia. Elle avait beau être née royale, Anya n'aimait pas attirer l'attention. Sa tranquillité, en revanche, elle la chérissait comme un bien précieux, aussi était-elle ravie de constater que la salle était relativement vide.
La jeune femme s'installa, parcourant rapidement la carte qui leur avait été laissée. Elle avait rapidement fait son choix quand il n'avait toujours pas ouvert le menu qu'elle continuait de lire machinalement.
De temps à autre, Anastasia reportait son regard sur Dimitri pour l'observer à la dérobée. Il semblait encore une fois perdu dans ses réflexions mais qui se décida finalement à ouvrir son menu. L'espace d'un instant, elle avait songé à lui demander s'il avait besoin qu'elle lui lise la carte - n'ayant pas souvenir qu'il parlait français aussi couramment qu'elle - mais s'était ravisée : dans ces hôtels touristiques, les menus étaient au moins traduits en anglais et celui-ci ne faisait pas exception. C'était tout aussi bien ainsi. Les talents linguistiques d'Anastasia pourraient servir à une autre occasion.
- Ta chère maman ne nous a pas fait promettre de lui rapporter quelque chose, je pense qu'on est pas obligé de s'obséder là-dessus, approuva Anastasia avant d'enchainer.
Si déjà ils avaient lancé le sujet, autant le creuser à fond, non ?
Il paraissait impossible à Anya de passer par Paris sans rapporter un petit quelque chose à sa grand-mère car Paris avait également une signification particulière dans le cœur de l'impératrice douairière. Pour le reste, c'était sans doute pratique de ne pas avoir trente six mille amis. Ainsi ils éviteraient de payer un surplus au retour ou pourraient, éventuellement, pourrir leur fille plus qu'elle ne l'était déjà. Mais il paraissait bon à Anastasia de rapporter un petit quelque chose à sa bonne amie Tara qui se plaignait souvent de ne pas voyager et avait, au fil de l'année écoulée, commencé à compter aux yeux de la grande duchesse.
Les commandes furent rapidement passées, probablement du fait de l'heure tardive du dîner, ce dont l'estomac d'Anastasia n'allait certainement pas se plaindre. Elle s'étonna que Dimitri ne commande qu'une ratatouille, un plat somme tout léger, quand elle commandait une sole meunière, mais ne fit aucun commentaire, étendant seulement ses doigts froids de l'autre côté de la table pour les glisser dans la paume chaude de Dimitri.
Il n'était pas spécialement féru de longues tirades, se contentant bien souvent de monosyllabes, compensées cependant par l'expressivité de son visage, au demeurant très plaisant à regarder. Anya parvint néanmoins à lui tirer quelques observations banales le temps que leurs commandes arrivent.
Et quand ces derniers arrivèrent enfin, ils trinquèrent avant d'entamer leur plat appétissant. Contre toute attente, la ratatouille présentait bien, nota Anastasia, cependant plus alléchée par son propre choix.
Alors qu'ils dégustaient leur premier vrai repas français, celui de midi ayant été rapidement avalé, la question du programme de la journée se posa à nouveau. Instinctivement, Anya tourna les yeux vers les vitres noires de nuit, songeant au froid mordant de la capitale. Elle acquiesça en silence : oui, la météo serait un argument de taille contre ou pour le bateau mouche, c'était certain.
- Espérons, alors... Et où allons nous, maestro ? s'enquit la jeune femme à l'évocation du surlendemain.
Anya était intriguée, ce qui se lisait nettement sur son visage. Comme à son habitude, cependant, Dimitri avait subitement perdu le sens de l'audition et trouvait un intérêt intense aux légumes restants dans son assiette. Typique, songea sa fiancée en roulant des yeux. Elle aussi reporta alors son attention sur sa propre assiette. S'il y avait bien une chose qu'elle ne ferait pas, ce serait de le supplier de lui répondre.
Alors très vite la conversation prit une autre direction tandis que leurs assiettes vides prenaient celle de la cuisine.
Qu'il était agréable de dîner dans un aussi joli cadre en aussi charmante compagnie. Dimitri et ses mystères étaient peut-être un poil agaçants mais Anastasia ne les auraient changés pour rien au monde. Elle s'était même surprise à ne penser qu'à lui, qu'à eux, au cours de ce dîner. Abigaëlle ne s'était rappelée à son souvenir qu'une fois de retour dans leur chambre, alors qu'elle enfilait un débardeur et un jogging pour se glisser sous les draps encore défaits. Anya sentit bientôt Dimitri l'y rejoindre et vint se coller à lui avant de laisser Morphée l'emporter dans ses bras.

***

Anastasia avait dormi comme une masse et se réveilla en pleine forme, quoiqu'un peu désorientée. L'espace d'un instant, elle avait oublié qu'ils étaient à Paris. Mais très vite, les souvenirs de la veille lui étaient revenus en mémoire et elle avait bondi hors du lit, prête pour cette nouvelle journée dans la capitale.
Elle n'était pas mécontente de voir que la météo se montrait plus clémente que la veille. L'air était moins mordant et les rues qu'ils empruntèrent plus vivantes. Dimitri et elle s'étaient rapidement mis d'accord sur le programme de la journée et goûtaient aux plaisirs des viennoiseries françaises tout en déambulant dans Paris.
Dimitri et ses souvenirs s'étaient improvisés guides et Anastasia le laissait faire. C'était tellement rare qu'ils parlent de leur ancienne vie, qu'il accepte sa coexistence avec la nouvelle qu'elle avait envie d'en profiter.
- Je suppose que les souvenirs altèrent toujours un peu la réalité, commenta Anastasia alors qu'ils apercevaient les chevaux ailés du pont Alexandre III. Mais peut-être qu'on pourrait en créer de nouveaux ? suggérait-elle l'instant d'après alors qu'ils poursuivaient leur périple en direction des bateaux mouches. C'est pas que j'aime pas les anciens... Y en a de très sympas... et de moins sympas, aussi. Mais je crois que ce n'est pas bon de vivre dans le passé. Et puis... cette fois personne ici de veut ma mort ! Si tu n'as fâché aucun Français, je pense qu'on sera tranquille pour le séjour, sourit la jeune femme.
Ils arrivèrent finalement là où partaient les bateaux mouches et se massaient les touristes. Anya grimaça en observant la foule bien moins romantique que le souvenir qu'elle avait de cette attraction. Ils auraient peut-être dû songer à privatiser un appareil... Tant pis. A Paris, et même en hiver, il fallait s'attendre à subir la foule.
- C'est ce que je disais, les souvenirs et la réalité, c'est jamais pareil. Tu viens ? On a de nouveaux souvenirs romantiques mais pas trop à créer.
Sans attendre d'accord formulé, Anastasia l'entraina vers la billetterie mais il fallut un peu de temps avant qu'ils n'embarquent parmi la foule.
- Pas sûre qu'on puisse danser sur le pont aujourd'hui, souffla la rouquine en l'entrainant vers l'arrière du bateau que les badauds délaissaient au profit de l'avant. Mais ici ça m'a l'air pas mal. A défaut je crois qu'on peut toujours s'embrasser comme des adolescents...
Le bateau mouche démarra sur cette remarque espiègle et Paris commença à défiler sous leurs yeux. Anastasia s'était accoudée à la rambarde et observait la ville d'un air rêveur.
- Il y a quelque chose que je me suis toujours demandée, amorça-t-elle après un instant en faisant volte face pour le regarder, lui. Comment tu as su que j'avais besoin de toi et où me trouver ?
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