Olaf savait bien ce qu’il disait. Il avait peur de fondre, comme avant… sauf qu’avant, il avait Elsa avec lui… maintenant, il ne l’avait plus. Sans elle, il allait finir par devenir une flaque non ?

- Moi j’ai déjà fondu plusieurs fois à l’époque. C’était étrange. Mais maintenant ça va mieux. Heureusement que votre travail n’est pas tout le temps si dur. J’avoue que je n’ai jamais appelé les pompiers…

Même pas pour aider un chat dans un arbre, ça il le faisait de lui-même… (même s’il avait déjà eu a faire à Kot à plusieurs reprises … le chat noir aime sauter sur son visage et le griffer en l’utilisant comme trampoline …). Olaf ne pensait même plus à dire ce qu’il était avant. S’il ne le cachait pas, il ne le criait pas non plus. Pendant 6 ans, il avait eu peur de le dire pour qu’Anna l’apprenne … maintenant … Il ne le cachait plus.

- Je vois tout à fait. Et je comprends aussi. Je me sens pareil. Comme si je n’avais pas à être ici, et pourtant j’ai plus de souvenir s ici que dans mon monde … mais je ne sais pas. Peut être parce que je n’ai pas de véritable attache ici … je ne sais pas.

Olaf ne disait rien, mais penser aussi beaucoup. Il pensait à plein de chose. Il pensait à ce qu’il aurait fait dans son monde, ou dans celui-ci … s’il n’y avait pas eu la malédiction en tout cas… Olaf observa la jeune femme … Il essayait de l’imaginer en tant que voiture, et il ne pu que sourire, encore et encore.

- Oui, c’est incroyable, mais c’est magnifique ! J’aimerais pouvoir aller aussi vite … … en faite, non j’aurais trop peur de me faire mal … mais je trouve cela particulièrement incroyable. Tu ne veux pas faire de voiture de courses ?

Olaf suivait la jeune femme, et il souriait toujours. Il avait eu de bonnes idées. Elle avait eu de merveilleuses idées et olaf notait tout cela dans sa tête avec un plaisir non feint.

- je connais des lieux oui en effet, mais je ne connais pas encore tout. Je dois me perdre pour arriver à destination.

Comme il connaissait les lieux parce qu’il venait à se perdre, il était obligé de faire toujours le même chemin pour arriver à son point. Il prit le téléphone et regarda doucement la voiture. Il ne savait pas conduire qu’il avait déjà envie d’acheter une voiture.

- J’adore les couleurs ! Je serais pour, et surtout si elle sourit !Et je suis archi pour ! J’accepte avec plaisir de jouer le jeu.

Il se mit à regarder les panneaux en donnant des explications étranges pour chacun panneaux qu’il pouvait croiser.

Au fur et à mesure qu’il discutait, Dinah avait l’impression de perdre un peu plus le fil. Il parlait de fondre comme on parlait de rôtir au soleil...ou cela avait-il un sens bien plus littéral ? Mais c’était impossible, parce qu’il était fait de chair et d’os, comme tout un chacun ici bas dans ce monde et… Cela signifiait qu’il était néanmoins lié au température et visiblement au froid, comme en démontrait son métier actuel. Glacier… Se pouvait-il qu’il soit ?….Cela semblait irréaliste et pourtant….

- « Es-tu...un...ancien...bonhomme de neige ? »

Voilà, elle l’avait dit. Cela paraissait toujours aussi irréel que possible même formulé à voix haute et pourtant… Pourtant ça collait énormément. Il y avait quelque chose chez cet homme qui transparaissait la joyeuseté, l’insouciance, l’innocence… Comme les souvenirs enneigés, les flocons, les luges que les enfants traînaient derrière eux dans de grands éclats de rire, les bataille de boules de neiges qu’ils s’amusaient à s’envoyer. Elle. Maru, Ben...Shinta. Etait-ce normal de se sentir si émue ? Sans qu’il n’ait besoin de parler, c’était comme se retrouver en présence de l’incarnation de notre enfance. Noël, la période favorite de tous…

- « Excuse-moi. Ca ne me regarde pas en fait… Mais...ça serait. » elle chercha le mot exact, le trouva sans réel effort « bien. Vraiment bien. »

Elle se tut à nouveau, puis sourit à nouveau, le coeur plus léger, comme si la révélation de son nouvel ami apportait une délicatesse nouvelle à sa vie.

- « Ne t’inquiète pas, la majorité des habitants de cette ville n’a jamais encore appelé les pompiers. Tant mieux d’une certaine manière. Au moins, malgré toute la magie dont cette ville regorge, on évite encore plus ou moins le feu quotidiennement. Cela dit, cela aurait été assez dommage qu’avec toutes les capacités de tout à chacun, ce dernier soit le pire fléau de tous, non ? »

C’était ironique. Au final, il aurait mieux valu. L’ordinaire n’existait pas à Storybrooke et sûrement fallait-il se satisfaire que ceux qui possédaient bien plus de pouvoir qu’autrui n’en n’ait pas encore réellement abusé depuis la levée du sort. De par son expérience, son vécu, la pompière refusait de laisser sa ville à feu et à sang sur les simples caprices d’éventuelles minorités. Au besoin, elle saurait se lever et donner toute l’aide nécessaire pour faire régner l’ordre. Elle n’avait jamais été attirée par la police ou l’armée néanmoins, préférant protéger avant tout. Avec son frère et Ben, ils se complétaient ainsi. Et Shinta...Shinta soignait.
Elle déposa néanmoins un regard peiné sur Axel, lorsqu’il lui révéla ressentir la même chose. On aurait pu penser qu’un être comme lui se devait d’être perpétuellement joyeux. Mais le temps, la condition humaine changeait les émotions, les brisait, les distordait, pour créer un être nouveau, un être imparfait. Pas tout à fait lui-même mais plus comme autrefois. Et rien ne pourrait plus jamais changer cela. Même si elle redevenait une voiture un jour, son ancienne vie ne serait plus jamais comme avant. Elle avait aimé. En tant qu’humaine. Et un humain qui plus est. Elle avait vécu comme une humaine et être privée de cette vie lui paraissait à présent comme aussi douloureuse qu’être privée de l’ancienne. Le Sort était levé mais les effets de la Malédiction ne s’en irait jamais pour ceux de sa condition.

- « Je suis vraiment désolée pour toi, Axel. Sincèrement… Je suis… passée par ce stade aussi. Bien plus vite… Je me sentais...désaxée, sans attache »

Ses yeux ne quittaient pas la route mais son coeur s’était retrouvé projeté des années en arrière, lorsque Dinah était redevenue Dynamite…

- « Je ne savais plus qui j’étais, je perdais pieds dans ma réalité, ceux qui m’entouraient me semblaient irréels, ceux qui avaient compté n’étaient plus là et mes souvenirs se mêlaient aux faux. C’était trop et je suis partie. Avec un sac à dos, à pieds… au départ. Monter dans une voiture me perturbait trop. J’ai pris un bateau, j’ai voyagé. Un peu partout. Un peu nul part, en fait. Je me suis recentrée et… un jour j’ai réalisé que je voulais surtout être ici. Auprès des miens. » elle avait sourit lentement avant de dédier au glacier un regard incertain « et toi ? Tes proches ne t’aident pas ? Ou peut-être sont-ils partis ? Je sais que parfois, certains ont préféré partir pour le vaste monde et s’y sont plus. »

Où pouvait bien aller une famille de bonhommes de neige ? Jusqu’en Sibérie peut-être ? Ou peut-être avait-il été emporté sans sa famille jusqu’à ce monde ?
Une chose était sûre cependant, quoiqu’il en pense, il n’était pas seul. Dinah elle-même en avait été la témoin muette lors de son hospitalisation. Quoiqu’il en pense, il était aimé.

- « Oui, j’étais une voiture jaune… Ca me touche que tu trouves ça super, beaucoup trouvent ça...plus bizarre que génial. Et je les comprendrais si j’étais à leur place. » elle avait rit d’un rire clair avant de poursuivre « Mais la course, j’y pense. Flash enfin Angelo maintenant en fait encore, à haut niveau. Il était de base une voiture de course, donc ça aide. Je pense qu’il était bien trop accro à la vitesse pour raccrocher. Moi, ce qui me motivait, c’était..l’aide. Aider les autres. Et l’action un peu. Je pense que je serais à la longue moins épanouie, comme pilote que comme pompière. Ca me plait bien. »

Il semblait croire qu’il n’était pas taillé pour la conduite mais cela ne restait qu’une impression que la jeune blonde avait envie de déraciner avant que la peur ne gagne à jamais le coeur innocent du glacier.

- « Se perdre pour se retrouver, c’est assez philosophique, au final. Il paraît que c’est en allant au coeur de soi que l’on se connaît vraiment. Donc la comparaison doit être vrai. Ca plus « Tous les chemins mènent à Rome » »

Elle lui avait montré des voitures et l’enthousiasme dont il avait fait preuve avait donné de la joie à la jeune femme. D’un coup, sa décision était prise ! Elle allait lui donner des cours ! De conduite oui. Bien sûr, il existait des moniteurs autoécoles mais quel meilleur professeur qu’une ancienne voiture elle-même ? Au moins la sécurité, le bien-être du véhicule, son respect aussi entrerait en ligne de compte.
Elle avait déposé les fleurs jusqu’à chez-elle puis l’avait incité à tenter d’identifier les panneaux pour la guider jusqu’à son magasin. Ce qui offrit une déferlante d’innocence toute nouvelle à laquelle Dinah n’était pas préparée. Que quelqu’un puisse ignorer jusqu’au sens des panneaux de circulation les plus basiques la déroutait un peu.
Cela restait amusant et attendrissant, comme d’écouter Sally évoquer les formes des nuages et peut-être suffisait-il de l’envisager ainsi. Axel avait l’intelligence d’un adulte dans des rêveries d’enfant.
Doucement, elle désigna le panneau stop du doigt

- « Cela là, c’est « arrêt immédiat de trois secondes », c’est un peu long comme nom, alors on l’appelle STOP, le but, et il est rouge pour être intimidant, c’est de nous forcer à nous arrêter. Mais Stop n’est pas mal intentionné, il a juste pour but de permettre aux autres voitures de l’autre rue de circuler avant nous, il les préfère d’une certaine manière...mais il nous protège aussi. Tu vois ? »

Peut-être la trouverait-il totalement ridicule mais quelque chose lui disait qu’il valait mieux jouer son jeu, un peu pour au moins l’amuser avec des histoires et l’intéresser à l’exercice.
Et la glacerie se trouvant à à peine cinq minutes en voiture, au pire, il ne s’ennuierait pas trop longtemps.

Olaf eu un large sourire avant de taper dans ses mains pour applaudir la jeune femme dans toute la joie et la bonne humeur qu’il pouvait avoir.

- Oui je suis Olaf. Un bonhomme de neige. Le seul et unique je crois.

En tout cas, il n’avait jamais entendu personne lui dire qu’il y avait deux bonhommes de neige en ville. Il était le seul. Et même s’il ne l’avait jamais crier sur tous les toits, il se demandait bien si d’autres pouvaient y être maintenant. D’autres bonhommes de neige s’entends.

- je n’ai pas honte d’être un ancien bonhomme de neige. Je ne le crie pas sur tous les toits parce que pour le moment je n’ai pas encore eu le courage de parler à Elsa, celle qui m’a créer, alors je ne veux pas lui faire de peine. Mais c’est ça.

Toujours son grand sourire aux lèvres, il sourit à la jeune femme en lui montrant toutes ses dents blanches. Même son regard avait quelque chose de chaleureux et de pur. On parlait d’Olaf après tout non ?

- la magie ne résous pas tout, tu as raison. Mais c’est dommage de ne pas enlever le malheur avec la magie. J’ai l’impression qu’ici elle fait plus de mal que de bien et c’est très triste je trouve.

Alors que la magie, c’est magique. C’est le pouvoir de la magie, de faire de l’émerveillement, du merveilleux, de l’extraordinaire…. À la place de quoi on faisait des malédiction et des démons qui ne savent pas comment être gentil…. Ce n’était pas gentil.

- Ne t’en fais pas. J’ai Anna qui est là, mais elle a sa vie je ne veux pas être un poids. Pareil pour Elsa, elle est là aussi, mais je ne lui ai pas encore parlé parce que …. C’est comme ça. Maisj’ai plein d’amis. Et je considère que mes souvenirs, même faux, ont une partie véridique.

Il avait eu des amis, se souvenait de ce qu’il avait pu faire ensemble. Le souvenir était partagé et vivant dans le coeur des deux…. Alors pourquoi partir du principe qu’ils sont faux ? Pourquoi ne tout simplement pas accepter que si, les souvenirs sont vibrants de vie et qu’on peut les considérer comme tel. Pas tous les souvenirs sont vraies, ceux seuls, on peut les oublier, mais ceux qui ont un écho, Olaf n’avait pas envie de les abandonner.

- Si tu aimes ce que tu fais alors n’en change pas. Moi j’adore être glacier, et je ne changerais cela non plus pour rien au monde, Tant que tu t’épanouie. Mais ce n’était pas parce que tu étais avant une voiture de sauvetage que tu es une pompière maintenant. C’est parce que tu es comme ça au fond de toi déjà avant.

Les voitures ne naissaient pas à devoir faire ce qu’elles veulent si ? Il ne savait pas que c’était un peu ça, mais dans tous les cas il savait avoir raison. C’était sa nature profonde qui faisait d’elle ce qu’elle était aujourd’hui, pas son ancienne vie. Olaf regarda le panneau stop et sourit.

- Donc, le panneau qui ne sourit pas s’excuse de nous faire attendre pour faire passer les autres parce que c’est plus sécuritaire ? Pourquoi seulement trois secondes ? Et s’il y a plein de monde et qu’on passe pas, on doit attendre combien de temps ?

Parce qu’apprendre à conduire, ça lui plairait bien à lui… il le pense en tout cas.

Olaf était un bonhomme de neige… Elle l’avait imaginé, pensé, refuté et pourtant il le confirmait à présent avec sa naïveté d’enfant. Elle comprit soudainement pourquoi un être aussi dur que Gabriel Agreste pouvait être aussi attaché à Axel Oswald. Il était pur. Sans malice. L’incarnation du bonheur et de ce qui faisait l’essence même de Noël, le partage, l’amour et la joie. Pas étonnant que le couturier puisse se sentir en confiance auprès de cet être qui chassait les grises tristesses à coup de sourires et de bonté. Elle l’admira soudain lui et son incroyable résilience. Voir le monde comme un amas lumineux lui paraissait impossible à elle qui avait vu tant d’horreurs et pourtant le glacier s’évertuait à lui prouver le contraire.

- « Un bonhomme de neige...c’est….wahou...génial. »

Il trouverait peut-être ridicule qu’elle puisse en être si épatée mais malgré toutes les curiosités que contenaient la ville, elle n’avait jamais pensé qu’un bonhomme de neige puisse prendre vie et devenir humain.
Et puis peut-être avait-elle tort… Si ça se trouvait lui ne trouvait pas ça génial. Elle ne connaissait forcément que le bon côté de ce qui lui apparaissait être sa vie. Mais elle n’avait pas partagé son existence et lorsqu’il se confia un peu à elle, il laissa entrevoir des failles et des souffrances qu’elle n’avait pas elle-même apperçu. A force de voir sous le nez un sourire, on oubliait parfois que ceux-ci masquaient chez certains des drames et des douleurs.

- « Pourquoi lui ferais-tu de la peine ? Si elle t’a créé, elle a créé quelqu’un de formidable. » elle garda le silence un petit moment avant de déclarer aussi « A te voir, à voir tous ceux qui se sont pressés à ton chevet à l’hôpital, tu fais énormément de bien aux autres. Ils t’apprécient, ils t’aiment. Même les plus improbables d’entre eux, tu fais entrer une lumière dans leur coeur. Il n’y a aucune raison pour qu’elle ait de la peine. »

Et puis, après tout, la pompière ne voyait pas en quoi cela serait si difficile pour la créatrice du bonhomme de neige de faire le chemin inverse. Axel était visiblement quelqu’un de délicat, de sensible. Timide même malgré sa facilité à se nouer avec les autres, il était...plein d’introspection. Si cette Elsa le connaissait si bien, elle aurait du le savoir et peut-être prendre les devants. En ne faisant rien, c’était elle après tout qui causait le plus de peine.

- « Tu ne seras jamais un poids. Pour ceux qui sont ta famille, tes vrais amis, tu ne seras jamais un poids. Et je suis d’accord avec toi, rien ne changera pour eux, si ce qu’ils ont ressenti dans leur coeur était vrai. Malédiction ou non, nous avons créé des souvenirs avec ceux que la vie voulait nous faire rencontrer. Peut-être parce que nous en avions besoin. »

Elle ne savait pas si elle croyait au Destin. Pas vraiment. Dinah était un esprit simple. Pas dans le sens « intelligence réduite », elle s’en était bien sortie au lycée, mais ne faisait tout simplement pas partie des gens capables de se torturer l’esprit à réfléchir à la Vie. La Vie advenait comme elle venait, point. Il suffisait surtout d’en profiter et d’être satisfaite de soi-même à la fin de la journée. Elle prenait les jours comme ils venaient, un par un, sans s’angoisser, en vivant pleinement l’instant présent.

- « Tu as raison. J’aime ce que je fais. Je crois que cela fait partie de ma personnalité, depuis...toujours. C’est moi qui ait voulu être une voiture de sauvetage… c’est moi qui ait voulu être parachutée...C’est moi. Juste moi. C’est ce que je suis. J’en suis satisfaite, je ne veux pas forcément plus. Ca me va. Et je pense que tu es également comme moi, sur ce point, on ne fait pas des choses parce qu’il faut le faire, mais parce qu’elles nous font plaisir avant tout, sans se forcer. »

Bien évidement, elle agissait d’abord pour faire plaisir à ses proches mais elle ne le faisait absolument parce que cela « faisait bien de le faire ». Elle les aimait, point final.
La récente interrogation venait du retour de Shinta, son ami, le seul qui faisait battre son coeur, et qui menait de front une sorte de guerilla contre son passé, contre lui-même. Il affaiblissait son image pour fuir les autres, l’image qu’il leur renvoyait…
Le dialogue d’Olaf et les panneaux qui lui désignaient la firent sourire et la ramenèrent à la réalité, à l’instant présent, léger et simple.

- « Exactement. Le panneau qui ne sourit pas est plus sécuritaire. Trois secondes parce qu’on considère qu’en trois secondes, tu as le temps de bien regarder que la voie est dégagée, des deux côtés. S’il y a plein de voitures, l’idée c’est d’attendre qu’elles passent toutes. Comme si tu leur faisais une politesse.
Stop est poli. »

Elle attendit, tranquillement que la dernière voiture soit passée puis redémarra maintenant en pratique ses instructions, tourna à droite après avoir mis son clignotant.

- « Ca c’est un indicateur. Si tu veux tourner, mais que tu es sur une voie à plusieurs chemins, tu dois indiquer aux autres ce que tu vas choisir. Donc là, je tourne à droite, je mets le clignotant à droite. C’est un peu un « qui m’aime me suive ». Sauf qu’il faut pas s’en vouloir si personne ne nous suit...Comme là ». Là j'ai fait un total flop. commenta-t-elle en regardant dans son rétroviseur arrière, dans un rire « le but c’est de prévenir les autres pour qu’ils puissent adapter leur conduite à nous. Que si on freine, ils puissent freiner aussi, tu vois l’idée ? »

Elle sentait qu’il s’amusait ; et elle devait avouer qu'elle aussi. Plus le temps passait plus elle sentait que...oui, elle était reconnaissante d'avoir croisé le chemin du glacier. Juste peut-être aurait-elle préféré des circonstances différentes mais...son naturel, sa simplicité. Il semblait un joyau de pureté, une de ces personnes d'une âme si belle qu'on se trouvait presque ému à leur contact.

La pompière resta un instant silencieuse. Bien évidemment, elle ne possédait pas les clefs pour faire vivre un bonhomme de neige ni expliquer sa création involontaire. Mais une chose restait sûre : on ne créait pas un bonhomme de neige vivant comme on créait...des épouvantails par exemple. La symbolique n’était pas la même et elle voyait difficilement le message négatif qu’aurait pu découler de la « création » d’Axel. Bien sûr, cela aurait pû paraître maladroit de lui dire ainsi. Aussi...bien curieux de se mêler et d’interpréter sans toutes les informations la vie d’autrui. Mais elle sentait malgré tout que cela taraudait encore le glacier. Même s’il tentait de le contenir, sa créatrice, cette Elsa comptait encore pour lui. Et représentait une sorte de mur qu’il n’arrivait pas à franchir.

- « Même si elle t’a créé par accident, ça ne fait pas de toi quelque chose de moins appréciable. Comme diraient certains « le passé il faut soit le fuir soit tout en apprendre », on a toujours tendance à choisir la première décision au début. Après...on finit par se rendre compte que la seconde est meilleure. Si elle ne te voit que comme un rappel du passé, alors elle se trompe. Tu as évolué, elle aussi. »

Elle n’enchérit pas, ne voulant faire un procès ni à l’un ni à l’autre. Cela ne la concernait pas et bien qu’elle ait envie de consoler Axel, elle se sentait maladroite. Parfois trop cash aussi et peinait à contenir ses pensées. Mais au moins, peut-être avait-elle réussi à le rassurer un peu en déviant la discussion sur ses amis. Un rire s’échappa de ses lèvres, sans moquerie en le voyant illustrer combien il tenait à ses amis. Oui, un vrai petit bonhomme de neige. Il aimait les gens et c’était une qualité rare, qu’elle espéra sincèrement qu’il parvienne à garder toujours.
Rien ne le garantissait, mais il fallait croire que le monde actuel ne l’atteindrait pas. Dans ces temps un peu curieux, on n’avait d’autant plus besoin de personnes comme lui, symbolisant l’espoir.

- « Jamais se forcer à faire ce que l’on n’aime pas. La vie n’est pas facile mais on dispose de plein de possibilités d’activités différentes, il y a forcément quelque chose qu’on aimera ».

Le sujet pris un contour plus sérieux, bien que les descriptions fantasques dont elle devait user pour personnifier les panneaux de circulation donnait une impression amusante à l’ensemble. Elle lui sourit gentiment

- « Tu prendras des notes la prochaine fois, j’ai un bouquin aussi sur les panneaux à la maison, si j’avais su qu’on ferait ça, je te l’aurais donné ! Bon ils ont des noms moins fun »

Elle eut tout juste le temps de dévier le volant vers la droite pour éviter une éraflure lorsqu’une voiture déboula à sa droite pour la doubler !

- « Sale chauffard ! » s’exclama-t-elle !

Dans d’autres circonstances, elle aurait été moins polie. Mais Axel à sa droite obligeait l’emploi de toute politesse, comme lorsque Sally montait avec elle. Alors elle se contenta de comprimer ses mains sur le volant en soufflant fort.

- « Encore un qui se prend pour un fou du volant ! » grogna-t-elle l’image de l’accident d’Axel encore profondément ancré dans son esprit.

Visiblement lui n’en éprouva pas de séquelle et tout juste se contenta d’énoncer d’un ton sérieux et professoral qui lui arracha un sourire que celui-ci ne respectait pas le code de la route :

- « C’est le moins qu’on puisse dire ! C’est interdit car très dangereux. Tu vois, on regarde les « rétroviseurs » les petits miroirs là et là pour savoir si une voiture nous suit, sa distance, et savoir si elle veut nous doubler. On ne double que par la gauche. Et du coup, comme il enfreint les règles, il risque gros, il risque de causer un accident. »

Sans se presser, le prochain feu les ramena près de la voiture qui les avait doublé, et dont le chauffeur patientait tranquillement sur la voie de droite.

- « Tu vois, en plus c’était bien la peine de nous doubler ».

Et encore fallait-il résister à l’envie d’abaisser le carreau du glacier pour fusiller le conducteur du regard.

Il parlait de transpercer, jouer avec ses membres et quiconque aurait fait irruption dans cette voiture les aurait regardés d’un air ahuri et….aurait peut-être crié à l’alerte psychopathe. Aussi. Mais, toutes ces activités semblaient barbares et qu’un être « qui n’aurait pas fait de mal à une mouche » pouvait être un psychopathe – merci Psychose – Dinah sentait ...non...elle savait que ce n’était pas le cas d’Axel.
Il suffisait de s’imaginer lesdites choses dans la peau d’un bonhomme de neige – gros effort mais pas si complexe si on l’imaginait qu’en surface- et on comprenait facilement le caractère démontable de…toute...toute la structure en fait. Le plus incroyable tenait au fait qu’il restait conscience même dispersé.

- « Ben...Je pense pas que tu aies été créé pour que ta créatrice joue avec toi, si ? Alors, maintenant si elle te respectait en tant que bonhomme de neige, ça ne devrait pas changer grand-chose pour elle ».

Elle eut un sourire encourageant puis poursuivit sa route.

- « J’arrive difficilement à me visualiser dans un autre métier… Secouriste peut-être ? Ou policière… Pilote de course. Ou monitrice auto-école » compléta-t-elle dans un clin d’oeil mignon. « En fait, c’est assez difficile, y a plein de métiers passionnants… Tout est susceptible de plaire ou de déplaire, ça dépend surtout du contexte, de l’autour. »

Pour sa part, elle avait eu la chance d’avoir une équipe soudée, un peu brute mais sincère et c’est ce qu’elle appréciait chez les gens. Elle s’était intégrée dans la bande sans jamais s’imposer, naturellement. Elle savait que Shinta éprouvait quant à lui bien plus de difficultés parfois, lord de ses stages. Il était plus fermé, moins communicatif et d’une certaine manière plus timide que Dinah qui bien que peu bavarde restait facilement accessible.

- « Oh tu peux, il n’y a aucun mal, l’important, c’est que tu t’y retrouves !  Et parfois c’est plus parlant avec des images».

Tout en évitant de regarder une nouvelle fois l’homme qui l’avait doublée sans le moindre ménagement, elle hocha la tête, tout en portant le regard droit devant elle :

- « Exactement. Le code de la route, c’est comme des règles de la vie de tous les jours. Comme nous allons plus vite qu’à pied, il faut s’assurer que vu la vitesse chaque personne soit capable de s’adapter et d’anticiper. Tu vois ? » interrogea-t-elle en surprenant son sourire posé sur la voiture.

Décidément, il était incapable de colère. Cette manière de considérer la vie, de lui sourire sans même prendre conscience du danger ou en pardonnant lui était propre. Et Dinah l’admira à sa manière.

- « Rouler à l’envers ? Euh non ça c’est interdit ça… Si tu es dans une voie, il faut que tu roules dans le même sens que tout le monde. Il y a des panneaux qui te précisent quand tu es dans une route à sens unique, c’est à dire où les voitures ne peuvent pas se croiser. C’est un panneau bleu avec une grande flèche blanche du genre « Amis, allez tout droit ! » et dans l’autre sens un panneau t’interdit d’entrer de ce côté, c’est un panneau rond tout rouge barré d’un bâton blanc horizontal, un peu à la « vous ne passerezzzz pas ».

Elle se mis à rire, puis ajouta avec sincérité :

- « Je suis sûre que c’est dans tes cordes ! Tu peux y arriver. Quant à l’intérieur du capot, hum...Disons que lorsque l’on est une voiture c’est comme à l’intérieur d’un corps humain… Il y a des fils qui relient l’ensemble, mais là tout est...tout gris noir généralement. Je peux te montrer dès qu’on arrive à ton magasin si tu veux… Mais ce n’est pas très….Paillettes et couleurs, je préfère te prévenir. « 

- « Les postes avec de grandes responsabilités sont plus que stressants. D’une certaine manière, mon métier l’est mais comme on est...dans le feu de l’action et c’est le cas de le dire on a peu de temps de se prendre la tête. Il faut agir. On a pas le temps d’y penser. On doit réagir sur le coup ! » elle claqua des doigts et ajouta «  tout se passe dans un seul instant et le plus effrayant c’est après. Lorsqu’on voit les conséquences, lorsqu'on voit nos erreurs et ce qu’on aurait pu faire en mieux... »

C’était comme ça… On pouvait admettre qu’un métier plus calme apportait plus de joie mais...Dinah était Dinah. Volcanique, shootée à l’adrénaline et assez vive parfois. Un métier doux n’aurait pas convenu à sa personnalité...Et elle le savait, elle l’avait même parfaitement accepté !
Est-ce que le monde avait des drôles de normes ? Et comment ! Evidemment ! Dinah n’avait pas de mal à imaginer comment les individus réagiraient en tombant sur un Axel avide de câlins. Très mal à n’en pas douter. En paniquant pour les plus agréables d’entre eux, en hurlant sur le pauvre glacier qui n’avait rien demandé. Sûrement les plus gentils d’entre eux, le voyaient comme un original curieux voir un simple d’esprit. Pourtant, il n’était pas méchant, il était même sûrement le meilleur d’entre eux.

- « Les mœurs évoluent mais pas assez vite malheureusement...Et généralement les gens évoluent beaucoup plus vite vers le mal que le bien. Etrange comme on a vite tendance à croire que les autres nous veulent du mal que du bien... » Elle haussa les épaules d’un mouvement désinvolte alors que ses traits prenaient la forme d’une moue désolée « L’important je pense, c’est d’arriver à faire en sorte que le Monde ne parvienne pas à nous changer. Etre fidèle à ses principes avant tout ! Toi tu es un homme génial, et je pense qu’on a besoin de plus de personnes comme toi… Alors, même si c’est dur, essaye de ne jamais désespérer. Tu as le droit d’avoir des faiblesses, de souffrir, mais ne deviens jamais comme ceux qui te causent de la tristesse ».

Elle l’écouta formuler ses inquiétudes, ses propositions quant à la route et sourit gentiment :

- « Si tu veux, je veux bien t’aider bénévolement ! On ferait ça, les jours où ça t’arrange et une fois que je t’estimerais prêt, je te donnerai le feu vert et tu pourras t’inscrire » proposa-t-elle avec douceur avant de lui adresser un sourire « Tu sais la personne qui démarre la conduite sans aucune appréhension est un imprudent qui n’est pas prêt ! Forcément qu’il y a des risques… Mais si tu es confiant et que tu écoutes les consignes, alors tout se passera bien. Ce qu’il faut, c’est te faire confiance et faire confiance à ta monitrice aussi...et essayer de te vider la tête, pour ne garder en mémoire que les manœuvres. Je suis sûre que tu y arriveras ! »

Ils étaient arrivés devant la glacerie et dans une manœuvre parfaitement exécutée, Dinah stoppa le compteur, en désignant le magasin :
- « J’ai trooooop hâte de goûter les parfums ! Tu en as à me proposer ? » interrogea-t-elle dans un sourire.