Se changer ne lui avait pas pris très longtemps. Kyô avait l’habitude de devoir prendre une douche rapide pour enfiler des vêtements propres : après tout, quand on est prof dans un dojo, les odeurs étaient régulièrement là et l’hygiène était d’autant plus nécessaire. Du coup il fut rapidement prêt et retourna attendre Tohru non loin des vestiaires pour femme. Il espérait qu’elle avait eu la bonne idée de prendre une douche elle aussi, cela ne pourrait que lui faire du bien et contribuerait à la réchauffer un minimum.

- On va les mettre au sèche-linge si tu veux, ça sera mieux que ton sachet. Proposa-t-il lorsqu’elle lui confia avoir mis ses vêtements dans un sachet. Non, ne t’inquiètes pas. La rassura-t-il avec un sourire.

Lui ne s’était pas embarrassé pour prévoir de le faire. Il attendait justement de savoir si la jeune femme voulait en profiter aussi pour mettre la machine en route. Sans un mot, Kyô la guida vers la buanderie où une machine tournait tandis que le sèche-linge attendait que l’on se serve de lui.

- Alors, tu veux l’utiliser aussi ou non ? Demanda-t-il tout en prenant l’adoucissant.

Kyô n’avait jamais supporté que le linge soit rêche. Là-dessus, il était bien un félin : toujours à préférer les trucs doux et pelucheux plutôt que les trucs qui grattent… Une fois l’histoire du linge réglée, le rouquin prit la main de Tohru et l’entraîna dans les couloirs vers la cuisine, qui heureusement pour lui était déserte. Son père n’avait pas encore eu sa lubie de cuisiner, ce qui était tant mieux…

- Tu veux un thé, un chocolat chaud ? Proposa-t-il. Un café peut-être ?

Après tout, si au Japon on buvait plus facilement du thé, ce n’était pas le cas aux Etats-Unis. Et dans un sens, ça n’était pas plus mal, au moins on avait pas à avoir peur de se tromper…

Après tout ce temps

A la première question de Kyô, Tohru se contenta d’un simple hochement de tête ses vêtements seraient effectivement secs plus rapidement ainsi et cela lui éviterait de les étendre en arrivant. C’était un aspect de sa personnalité qu’il ne montrait que rarement, et rare étaient les personnes qui pouvaient se vanter de l’avoir vu -non pas que Tohru soit du genre à le faire- mais elle savait que Kyô était quelqu’un de prévenant et de gentil. C’était juste très, très bien caché derrière un simulacre d’agressivité. Un peu comme un chat sauvage qui serait constamment sur ses gardes, et dont la première réaction était soit de grogner, soit de cracher pour intimider. Dès qu’on cherchait à le connaître un peu plus plus, on se rendait compte qu’il était beaucoup plus complexe qu’il ne voulait bien le laisser paraître et que comme tous les Soma, Kyô dissimulait ce qu’il ressentait vraiment. Cette complexité elle l’avait découverte au fur et a mesure, en vivant sous le même toit que lui l’envie de connaître le maudit du chat s’était mué en envie de connaître l’individu en lui-même, de savoir qui était Kyô et quelles étaient toutes les facettes composant sa personnalité.

Elle suivit a nouveau le rouquin une fois l’histoire du linge complètement réglé, se laissant entraîner à travers les couloirs du dojo. Tohru avait d’ailleurs beau tenter de les mémoriser ils lui donnaient tous l’impression de se ressembler. Pour Kyô qui avait toujours vécu ici ce devait probablement être plus facile étant donné l’aisance avec laquelle il la guidait. C’était un aspect de rouquin qu’elle connaissait bien maintenant mais elle ne pouvait s’empêcher de sourire à chaque fois qu’il se montrait prévenant.

- Du chocolat s’il te plaît lui demanda-t-elle lorsqu’il lui proposa une boisson chaude. Si ce n’est pas trop compliqué bien sûr se reprit-elle, sinon du thé ça ira très bien. Tout me va ! Assura-t-elle

Sauf peut-être le café, mais elle n’oserait jamais le dire de peur de paraître impolie, surtout qu’elle en servait dans le café où elle travaillait mais elle n’y pouvait rien elle trouvait cette boisson trop amer. Les seules fois où elle pouvait en boire, c’était lorsque Anna l’invitait à passer la journée juste toutes les deux, et qu’elle les emmenait dans un café du coin qui proposait des boissons a base de café mais avec d’autres ingrédients. Elle aimait particulièrement ceux avec du chocolat, d’ailleurs jusqu’à sa rencontre avec la jeune femme elle n’avait jamais trop osé goûter du chocolat, se contentant du thé parce que c’était ce qu’elle avait l’habitude de boire. Non pas qu’il n’y ait pas de café ou de chocolat là d’où elle venait, mais il était vrai que autant avec sa mère que lorsqu’elle habitait chez Shigure le thé était la boisson principale. Mais quand elle avait commencé à travailler en tant que baby sitter, Anna avait tenue à lui faire goûter cette boisson et elle devait reconnaître que celui qu’elle faisait était délicieux et même alors qu’elle avait obtenue la recette de la rouquine elle-même, Tohru estimait que quand elle le préparait il était loin d’égaler le sien. Cela était peut-être dût à la qualité du chocolat en lui-même, il était vrai qu’Anna utilisait celui qu’ils faisaient là où elle travaillait et pour en avoir goûté, Tohru savait qu’il était délicieux.

- C’est une amie qui m’a fait découvrir le chocolat chaud. Elle en fait un vraiment très bon, ils en vendent même à la chocolaterie où elle travaille, on pourrait y aller la prochaine fois comme ça tu pourras le goûter toi aussi. En plus, je suis certaine que vous vous entendriez vraiment bien !

La perspective de pouvoir passer du temps rien que tous les deux lui plaisait, mais elle ignorait ce que Kyô en pensait lui, alors le fait d’ajouter la possibilité qu’il puisse lui aussi se faire une amie lui avait semblé une bonne option. Parce que ce qu’elle voulait pour lui c’était également qu’il puisse se faire d’autres amis. Elle ne lui demandait pas de parler nécessairement de sa malédiction et ce même si elle était certaine qu’Anna n’y trouverait rien a redire, elle serait plus du genre à faire une blague pour dédramatiser la situation qu’autre chose mais elle comprenait parfaitement pourquoi Kyô plus que tous les autres ne voulait rien dire.

Quoi qu’il en soit, elle avait préféré anticiper au cas où sur la question de la boisson, si Anna prenait le temps d’utiliser du vrai chocolat pour le faire, elle savait que ce n’était pas le cas partout. La plupart des gens utilisaient du chocolat instantané acheté en super marché et clairement Tohru ne pouvait pas exiger de tous ses proches un niveau d’engagement du même niveau que celui d’une chocolatière professionnelle lorsqu’il s’agissait de la réalisation de cette boisson. C’était d’ailleurs pour cela, qu’elle n’avait pas mentionné la manière dont elle l’avait découverte, parce que elle ne voulait pas que le maudit du chat s’imagine qu’il fallait nécessairement sortir tout le matériel sans parler du temps de préparation, alors que c’était beaucoup plus rapide de mettre la poudre directement dans du lait et de passer tout au micro-onde. Pour elle il en avait plus que suffisamment fait, d’où la précision comme quoi le thé ça allait bien aussi.

Elle se demandait d’ailleurs, si Kyô s’était fait des amis pendant les années passés sous la malédiction de Regina, là où celle du Zodiaque n’était pas active et où il n’avait pas à s’en soucier. Dans leur monde il avait toujours naturellement attiré les autres a lui, ce qui était une des raisons pour lesquelles il y avait des tensions entre lui et Yuki, d’ailleurs Tohru s’était toujours dit que si ils avouaient seulement les raisons pour lesquelles ils se jalousaient mutuellement, cela leur permettrait peut-être de communiquer autrement qu’en se battant ou en s’en voyant des piques en pleine figure. Peut-être qu’ici les choses seraient différentes, en tout cas elle l’espérait sincèrement. L’un de ses souhaits pour le nouvel an chinois demeurerait que Kyô et Yuki réussissent à surmonter leurs différents.

Bizarrement Kyô ne fut pas très surpris, par aucune des deux réponses que Tohru lui donna concernant la proposition de boisson chaude. Le chocolat chaud était un truc très occidental, ce n’était pas vraiment ce qu’ils buvaient au Japon… Ceci dit, ça ne l’étonnait pas qu’elle apprécie cette boisson, pas plus qu’il ne fut surpris lorsqu’elle précisa qu’il ne devait pas faire quelque chose de trop compliqué et qu’elle prendrait du thé si le reste était trop long à faire. Il ne put s’en empêcher, un rire léger lui échappa.

- Décidément… Tu sais, si on te laisse le choix c’est que ça ne nous gêne pas de faire ce qu’il faut pour que tu aies ce que tu veux. Là en l’occurrence, ça me va très bien que tu veuilles un chocolat chaud, je trouve ça mieux pour se réchauffer après avoir été autant trempés par la pluie…

Et le rouquin se mit aux fourneaux, mettant une casserole remplie de lait sur le feu avant de sortir deux tasses dans lesquelles il ajouta la dose de cacao. Quand le lait fut assez chaud, Kyô le versa dans les tasses avant de reposer sa casserole et de mettre une cuillère dans chaque tasse. Il rejoignit Tohru devant le plan de travail qui séparait la cuisine en deux et où se trouvait des tabourets hauts. Il posa l’une des tasses devant elle et posa l’autre devant lui.

- Si tu veux rajouter du lait, du chocolat ou du sucre, n’hésites pas à le faire. Lui dit-il, sachant qu’elle était capable de se priver pour ne pas gêner. Je ne savais même pas qu’il y avait une chocolaterie en ville… Répondit-il, surpris. On ira si tu veux oui, sans souci.

Kyô n’avait jamais rien pu lui refuser, ça n’allait pas commencer maintenant. Donc si elle voulait aller dans une chocolaterie, le genre d’endroits bondés qu’il évitait, bah ils iraient et puis c’était tout. Tohru les avait tellement aidés, lui et les autres, qu’ils étaient tous prêts à faire n’importe quoi pour elle, lui y compris. Surtout lui en fait… Il avait même été prêt à disparaître de sa vie pour qu’elle n’ait jamais à choisir entre lui et sa mère. Au final, le choix elle l’avait fait quand même et Kyô avait toujours un peu de mal avec ça, même s’il en était ravi au fond.

- Est-ce que tu as mis des trucs en place pour retrouver les autres ? Demanda-t-il à un moment. Je sais que certains ont collé des affiches dans les rues après la fin du Sort Noir… Personnellement, je ne l’ai pas fait… Je n’avais pas envie de retomber sous l’emprise de la famille… Avoua-t-il à voix basse.

Pas envie de revenir aux origines, lorsque les Douze et le Chat étaient soumis à la volonté du chef de famille. Ça avait failli les détruire tous… Chaque génération avait vu son lot d’injustice envers l’un des Douze ou envers celui maudit par le Chat. Ca avait été un miracle que les choses se mettent à changer un peu pour ceux de sa génération, même si Akito n’était pas des plus doux…

Après tout ce temps

Elle ne put s’empêcher d’accorder un immense sourire à Kyô, lorsqu’il lui dit qu’il l’accompagnerait à la chocolaterie si elle le souhaitait. Ce n’était pas uniquement l’idée de faire quelque chose avec lui, même si ce serait mentir de dire que ça ne pesait pas beaucoup dans la balance. C’était surtout qu’elle souhaitait qu’il apprenne à connaître d’autres gens, et pour elle Anna était un excellent départ. La chocolatière était souriante, enjouée et extrêmement sociable sans pour autant envahir l’espace des gens. Elle était certaine, qu’avec un peu d’effort, Kyô pourrait avoir sa première amie ici. Et des efforts, elle était prête a en fournir autant qu’il faudrait pour qu’il soit heureux. Elle voulait qu’il apprenne à découvrir qu’ici il pouvait avoir une vie avec des gens autours qui n’étaient pas uniquement ceux du clan Soma, qu’il pouvait avoir des amis, des gens qui le soutenaient, qui le comprenaient. Car si beaucoup de gens se plaignaient pour la forme de Storybrooke et de sa normalité très relative, au fond ces mêmes personnes restaient pour une bonne raison. Il régnait ici un climat de tolérance, qu’il n’y aurait pas nécessairement eu dans leurs mondes d’origines. Mais la particularité de cette ville faisait, que ce qui pourrait passer comme incroyable, ou monstrueux aux yeux de personnes « normales » était complètement banale ici.

- C’est très bon. Le complimenta-t-elle, si tu n’avais pas été dans les arts martiaux je suis certaine qu’un métier en rapport avec la cuisine aurait été parfait pour toi.

Elle avait toujours été admirative de sa technique pour faire les onigiri. Ce n’était après tout pas donné a tout le monde de les réussir aussi bien, et si à l’époque Kyô avait balayé le compliment, estimant que ça n’avait rien de si géniale, Tohru elle avait toujours pensé l’inverse. Son chocolat en disait beaucoup également, elle le trouvait très bon, celui qu’elle faisait était encore loin de lui arriver à la cheville. Mais cela lui donnait envie de pratiquer encore plus pour y arriver. Après tout, son diplôme une fois en poche elle rêvait d’ouvrir sa propre boutique, et cela nécessitait un travail et une technique en amélioration constante. Elle ne pouvait pas simplement se reposer sur ses bases, pour faire vivre un commerce elle savait qu’elle devait attirer des clients, et pour ça rien de mieux que l’amélioration. Mais ça ne lui faisait pas peur, Tohru n’était rie si ce n’est travailleuse et elle savait parfaitement ce que cela impliquait quand elle s’était lancé dans ces études et quand elle avait songé dès la première fois a ouvrir sa propre boutique.

- J’y ai pensé. Avoua-t-elle pour les affiches. Mais je n’ai pas osé.

Elle ne savait pas très bien comment les autres réagiraient en voyant des affiches à leurs noms. Certains comme Uo ou Hana le prendraient bien, et seraient même capable de le faire également de leurs côtés. Mais pour d’autres elle ignorait totalement leurs réactions et craignait de faire un faux pas. Que ce soit bien ou mal, au fond elle était juste une personne qui essayait de faire changer les choses au sein des Soma et elle savait que ce n’était pas nécessairement bien vu par tout le monde. Pourtant loin d’elle l’idée de s’imposer d’une quelconque manière que ce soit, tout ce qu’elle souhaitait au final c’était retrouvé les amis qu’elle s’était fait et qu’elle était un peu venue à considérer comme sa famille, même si elle se garderait bien de le dire de peur de paraître trop arrogante ou de s’octroyer un droit et un statu qui ne lui revenait pas. Mais que ce soit Isuzu, Momiji, Yuki, Monsieur Shigure, Monsieur Hatori, Kisa ou tous les autres ils avaient chacun une place bien précise dans son coeur et dans sa vie.

Et l’aveu de Kyô, ne fit que redoubler sa détermination le concernant. Après tout ce qu’il avait vécus, il était normal qu’il ne veuille plus avoir de contact avec sa famille de peur de retomber sous leur coupe. Mais, les choses que l’on laissait faire dans leur monde d’origine, n’avaient pas lieu d’être ici. Personne n’accepterait ce qu’il se passait chez les Soma auparavant. Pas à Storybrooke, et c’était également pour ça qu’elle voulait tellement lui faire rencontrer d’autres personnes, parce que Kyô avait le droit d’être apprécié à sa juste valeur pour qui il était. De voir qu’il y avait des gens qui quand bien même il se transformerait accidentellement en chat devant eux, l’accepteraient quand même. Elle ne lui demandait pas de révéler tous ses secrets d’un coup, mais juste de prendre le temps de forger de nouveaux liens. Parce que plus que tout, ce qu’elle voulait pour Kyô c’était qu’il soit heureux et libre.

- Je suis convaincu qu’ici, tu pourras vivre ta vie comme tu l’entend lui avoua-t-elle.

Et elle veillerait autant qu’elle le pourrait et autant qu’il le voudrait à ce que ce soit le cas. Maintenant qu’elle l’avait retrouvé plus que tout, ce qu’elle espérait c’était de pouvoir rester à ses côtés aussi longtemps qu’on le lui permette qu’il s’agisse, d’un an, dix, vingt ou plus elle prendrait et chérirait chaque instant avec la même intensité. Elle comprenait à présent, ce qu’avait pu ressentir sa mère avec son père et a quel point la disparition de ce dernier avait dût l’affecter. Quant a elle, elle devait également apprendre à laisser partir sa mère. Elle s’était tellement raccroché à elle, de peur de la perdre a nouveau, de peur qu’elle ne rentre jamais à la maison comme lors de la période ayant suivit l’enterrement de son père. Quand on lui avait appris qu’elle avait été fauché par un camion, la vie de Tohru s’était comme écroulé. Et elle avait appris elle aussi à se reconstruire au contact des Soma, tout comme elle leur avait apporté l’affection et l’ouverture d’esprit dont ils avaient besoin pour pouvoir voler de leurs propres ailes et se défaire de l’emprise de leur famille.

- Je t’aiderais autant que tu le voudras ! Clama-t-elle. Je ferais tout pour que tu te rende compte de la personne merveilleuse que tu es.

Parce que au fond, c’était tout ce qu’elle demandait. Que Kyô se rende compte de ses qualités, et du fait qu’il pouvait être apprécié à sa juste valeur.

Kyô ne put s’en empêcher, la voir lui faire un si beau sourire, juste parce qu’il avait accepté de l’accompagner à cette chocolaterie qu’elle semblait tant aimer, le fit légèrement rougir. Il tenta de cacher le truc en buvant son chocolat chaud, avec de sourire en secouant la tête lorsqu’elle le complimenta sur la boisson qu’il leur avait préparé. Non mais des fois, elle cherchait à le complimenter pour rien du tout quoi…

- Ma cuisine est mangeable, mais sans plus, je ne suis pas un fin cordon-bleu comme toi. Tu sais très bien pourquoi j’ai été obligé d’apprendre à cuisiner, je n’en aurais jamais fait ma vocation…

Parce qu’il n’était pas si doué que ça. Il s’était toujours concentré sur les arts martiaux, voulant devenir un pro dans cette discipline depuis son plus jeune âge. La cuisine… Ça n’avait été qu’un moyen comme un autre pour ne pas mourir de faim, parce que Kazuma n’était vraiment pas doué dans cette catégorie, il faisait systématiquement tout brûler tant il pouvait être tête en l’air parfois. Donc Kyô avait appris, histoire qu’ils puissent manger. Et comme dans tout ce qu’il faisait, le rouquin s’était appliqué à apprendre les méthodes et à les faire siennes de façon à être au top et qu’on ne puisse pas lui reprocher quoi que ce soit. Ceci dit, jamais il ne le reconnaîtrait à haute voix, ni même en pensée : tout ceci, ce besoin de bien faire pour ne pas avoir de reproche et ne pas être abandonner, c’était ancré en lui comme un odieux secret, une faiblesse qu’il ne voulait pas reconnaître.

Etonnant. Kyô se stoppa, la regardant fixement un instant avant de boire une gorgée de sa boisson. C’était étrange que Tohru n’ait pas mis d’affiche. Venant de lui, c’était clairement normal, mais elle ? Peut-être s’était-elle dit qu’il ne valait mieux pas afficher les visages des membres de la famille Soma pour ne pas les déranger ? Ou un truc du genre… Ça lui correspondrait bien en tout cas. Ceci dit, il savait avec certitude que certains n’en auraient pas été dérangé : Momiji déjà, Yuki aussi sans doute, et Shiguré assurément. Le clébard adorait l’attention, alors voir sa tête sur une affiche l’aurait ravi…

- Ils n’auraient rien dit tu sais…

Peut-être que Kagura aurait protesté un peu avant de se calmer en le voyant aux côtés de Tohru. Rin… Rin n’aurait rien dit une fois que Yuki aurait calmé Haru. Ayamé était aussi timbré que le clébard donc il aurait adoré la pub et Hatori aurait été le plus blasé de tous. Même les autres n’auraient sans doute rien dit, Kisa aurait sans doute pleurer en voyant qu’on la cherchait et cet idiot d’Hiro l’aurait ouvert mais le rouquin l’aurait vite calmé. Non franchement, qu’elle soit à leur recherche n’aurait gêné aucun des Douze.

- Une fois débarrassé de la malédiction des Douze, sans doute. Acquiesça-t-il. Tant que ça ne sera pas le cas, ça ne sera jamais totalement la vie que je souhaite.

C’était un simple constat. Kyô souhaitait plus que tout être débarrassé de la malédiction de sa famille, ce qui lui permettrait de pouvoir prendre Tohru dans ses bras sans souci. Au fond, c’était le seul truc qu’il souhaitait vraiment. Pouvoir l’enlacer une fois sans se transformer avant de la laisser vivre la vie qu’elle souhaitait. Sans doute loin de lui parce que le rouquin n’imaginait pas que la jeune femme puisse vouloir rester amie avec lui alors qu’elle savait parfaitement qu’il était la cause du décès de sa mère… Ceci dit, Kyô était assez malin pour fermer sa grande bouche et ne pas en parler, profitant ainsi de la présence de la fille de Kyoko à ses côtés.

- Arrêtes de dire des bêtises ! Dit-il, rougissant, tout en lui faisant une pichenette sur le front. Tu dois vivre ta vie Tohru, ne fais pas en fonction des idiots de Soma que nous sommes. Le plus important pour nous tous, c’est que tu aies le sourire. Le reste… On s’en fiche pas mal.

Et puis, il n’était pas une personne merveilleuse… Ce qu’elle pouvait s’imaginer des trucs bizarres des fois ! Il était la cause de la mort de sa propre mère, son père voulait le voir mort, la mère de Tohru était morte parce qu’il n’avait pas été fichu de l’aider à cause de la Malédiction… Non sérieusement, il était tout sauf merveilleux.

Après tout ce temps

Quoi qu’il en pense, pour Tohru Kyô avait de manière indéniable un tas de qualités. Et si ne les voyait pas, elle elle les voyait parfaitement pour deux. Pourtant, elle ne pouvait s’empêcher d’espérer qu’un jour enfin il s’en rende compte et surtout qu’il arrête de culpabiliser vis a vis de l’histoire avec sa mère. Personne ne lui en voulait, et certainement pas elle. De plus, elle était certaine que sa mère aurait compris les choses et que jamais elle ne rejetterais la faute sur le maudit du chat. La vie ce n’était jamais une ligne droite, ça ressemblait plutôt a un mouvement de balancier. Il y avait des hauts, des bas, des épreuves et des périodes plus calme. Le tout était de les affronter sans jamais se départir d’un sourire. Du moins, c’était ainsi que Tohru voyait les choses. Elle savait qu’elle ne pouvait pas « imposer » sa philosophie au rouquin, et de toute façon, cela ne lui avait jamais ne serait-ce que traversé l’esprit. Pour autant cela ne l’empêchait pas d’espérer qu’un jour il puisse se voir de la même manière qu’elle, elle le voyait.

Elle se massa le front suite à la pichenette que venait de lui donner le rouquin, réfléchissant a comment lui répondre. Parce que, elle était très contente de sa vie mais elle le serait encore plus, si elle pouvait retrouver tout le monde. Elle ne se sacrifiait pas pour eux, elle ne vivait pas par procuration, elle tenait réellement a eux, tous d’une manière différente. Et même si jamais elle n’oserait le prononcer a haute voix de crainte de paraître trop arrogante, au final elle se sentait comme dans une famille avec eux tous. Pas celle du sang, mais celle que l’on se choisit. Et qu’ils soient heureux, que Kyô soit heureux faisait partie de son bonheur. Tout ce qu’elle voulait, c’était qu’il le comprenne et qu’il arrive enfin a se voir sous un jour positif. Évidemment, que cela n’arriverait pas en claquant des doigts, et qu’il y avait du travail a faire. Mais elle comptait quelque part sur les habitants de la ville pour le lui montrer.

Au fond, c’était ça le problème. Kyô ne s’était jamais estimé digne d’affection ou d’amour, et elle savait qu’a l’intérieur du clan Soma, pour ceux qui étaient dans le secret de la malédiction rien n’avait jamais été fait pour lui prouver sa valeur, lui faire comprendre qu’il était quelqu’un de bien. C’était d’ailleurs pour ça qu’il était jaloux de Yuki. Il avait l’impression que ce dernier avait tout, alors qu’au final Yuki vivait exactement la même chose que Kyô, il était aussi prisonnier que lui.

- Mais, si je le fais c’est parce que je tiens a vous et je veux que vous soyez tous heureux. Dit simplement Tohru, espérant simplement qu’il comprenne que de s’inquiéter pour eux c’était devenue « naturel » comme une seconde nature.

Quelque part, personne n’était parfait et ils avaient tous leurs démons. Elle aussi comme tous les autres, mais l’important c’était quelque part de profiter d’un nouveau départ ici à Storybrooke. Plusieurs années s’étaient passé depuis le levé de la malédiction, et ils avaient tous plus ou moins changés, chacun avait vécu des expériences différentes le tout était d’apprendre à concilier nouvelle et ancienne vie. Pour Tohru qui n’avait jamais vraiment eu de rêve et qui se contentait de ce qu’elle avait, de s’être trouvé cette envie d’ouvrir sa propre boutique de spécialités japonaise c’était tout de même un grand pas un avant, et la preuve que la malédiction de Regina l’avait changé. D’ailleurs, elle n’avait aucune rancoeur contre la sorcière contrairement a certaines personnes qui même des années après ne semblaient pas pouvoir se départir de leur colère. Tohru voyait ça comme une seconde chance, un moyen de recommencer à 0 pour ses amis, comme pour elle. Et elle espérait que chacun pourrait en profiter comme il le souhaitait, en commençant bien évidemment par Kyô. Après tout, pouvoir enseigner les arts martiaux ça avait toujours semblé lui tenir a coeur, et ici personne ne remettait en question sa capacité à le faire. Personne, ne voulait l’enfermer et personne ne pourrait l’enfermer et ce même sous couvert d’une soit disant « tradition familiale .» Ici il était libre et maintenant qu’elle l’avait retrouvé, elle comptait bien le lui montrer et lui faire profiter de sa vie.

Elle ne cesserait pas de chercher a lever la malédiction, mais rien ne l’empêchait de pouvoir faire les deux après tout. L’important, pour le moment c’était d’avoir réussi a retrouver Kyô. Le chemin serait encore long pour eux, et tout ne se réglerait clairement pas juste comme ça. Il leur faudrait s’écouter, se confier l’un a l’autre, et prendre en compte ce que chacun souhaitait pour parvenir a quelque chose mais Tohru l’aimait, et elle était prête a faire tout ce qu’il faudrait pour qu’il accepte que dorénavant il faisait partie de son monde, et qu’être avec lui, faire des choses pour lui la rendait heureuse. Qu’elle ne se sacrifiait pour personne, que ce n’était pas « juste » de la gentillesse. Mais Tohru était patiente, et elle était prête a prendre tout le temps qu’il faudrait pour que le rouquin comprenne cela.